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mercredi, 26 février 2020

Affaire « République » à Caen : quand deux adjointes de Joël Bruneau produisaient en justice des attestations grossièrement inexactes...

Caen, place de la République, Joël BRUNEAU, Malek REZGUI, Laurent CHEMLA, Mme Catherine Pradal-Chazarenc première adjointe, Mme Nathalie BOURHIS onzième adjointe (urbanisme)La mémoire qui flanche ?

Caen, place de la République, Joël BRUNEAU, Mme Catherine Pradal-Chazarenc première adjointe, Mme Nathalie BOURHIS onzième adjointe (urbanisme)

Du respect dû à la procédure

Après un recours gracieux rejeté le 12 octobre 2018 par Joël BRUNEAU, maire de Caen, nous avions demandé au Tribunal administratif d'annuler la délibération du conseil municipal du 25 juin de la même année, l'autorisant à signer la promesse de vente, puis l'acte authentique de vente aux sociétés de MM. Malek REZGUI et Laurent CHEMLA des 5272 m² de la partie arborée de notre place de la République, entre la Poste, la Préfecture, et la rue Jean Eudes.

Nous avions pour ce faire de solides arguments (ou « moyens » dans le jargon en usage devant les juridictions administratives), tant de fond (la « légalité interne ») que de forme (la « légalité externe »). Il ne sera pas question ici des premiers arguments (de fond), bien connus et déjà longuement exposés depuis plus de quatre ans.

Mais pour être « de forme », les questions de légalité externe ne sont évidemment pas accessoires. Le respect des règles de procédures, notamment, est une condition fondamentale du bon fonctionnement de la démocratie. Comme l'est aussi l'information complète et non biaisée des conseillers municipaux...

 

Rappelons que la délibération attaquée ne comptait pas moins de 8 pages, et que lui était annexé un copieux cahier des charges (18 pages), daté du 15 juin 2018, et rédigé par la SCP Barré Chuiton Lisch Violeau, notaires à Caen.

 

Le règlement intérieur du Conseil municipal

Toutes les délibérations d'un conseil municipal, sans exception, méritent d'être soumises à un examen sérieux. Les plus complexes, et les plus litigieuses, comme celle dont il est question ici, exigent qu'on y porte une attention d'autant plus soutenue. C'est même pour cette raison que l'article L.2121-22 du Code général des collectivités territoriales (texte cité à l'article 27 du Règlement intérieur du Conseil municipal de Caen) prévoit la possibilité de former « des commissions chargées d'étudier les questions soumises au conseil », en amont de la réunion dudit conseil.

Car il existe, à Caen comme ailleurs, un Règlement intérieur du Conseil municipal (adopté par délibération du Conseil à chaque début de mandat, soit le 30 juin 2014 pour celui qui se termine dans un petit mois). Un Règlement dont les dispositions contraignantes ne sauraient être considérées comme d'insignifiantes clauses de style...

L'article 27 de ce Règlement énumère les attributions des cinq commissions permanentes qu'il entendait créer, au nombre desquelles la Commission n° 1 : Développement, Attractivité et Prospective. Le même article 27 précise que chacune de ces 5 commissions comprend au maximum 16 membres.

Son article 29 précise le « fonctionnement des commissions », auquel s'imposent des règles très proches de celles qui régissent le fonctionnement du Conseil municipal. Il est prévu au même article qu'un fonctionnaire soit chargé de la rédaction du compte-rendu, lequel « fait état de la synthèse des débats et précise les avis exprimés. Le compte-rendu est adressé ou remis aux conseillers municipaux, au plus tard avant la séance publique du conseil municipal... ».

 

Pas de synthèse des débats, ni d'avis exprimés...

Certes, « Les avis émis sont valables quel que soit le nombre des présents »...A ne se fonder que sur cette dernière disposition, on aurait pu considérer comme « valable » l'avis rendu le 12 juin 2018 (sur la vente de 5272 m² de place publique arborée) par la Commission Développement, Attractivité et Prospective (lors d'une réunion dont on ne saura pas à quelle heure elle a commencé ni combien de temps elle a pu durer), même si seulement 4 de ses membres étaient présents, et 14 autres excusés.

Mais cet avis n'était certainement pas « valable » (au regard des dispositions de l'article 29 du Règlement intérieur), dès lors que le compte-rendu se limitait à l'énumération de 18 délibérations devant être mises au vote lors du conseil municipal du 25 juin 2018, invariablement assorties d'un laconique et insuffisant « Avis : favorable ». Sans la moindre « synthèse des débats », ni aucune précision concernant « les avis exprimés » (voir copie de l'avis en annexe ci-dessous).

 

Le Cahier des charges, pièce essentielle...

...mais validée trois jours plus tard !

De surcroît cet avis « favorable » ne pouvait pas non plus être considéré comme « valable », dès lors que le Cahier des charges notarié annexé à la délibération attaquée est daté du 15 juin 2018 (soit 3 jours après l'avis, délivré le 12 juin 2018, de cette Commission Développement, Attractivité et Prospective).

Sauf à créditer les 4 élus présents d'un don peu commun de divination, on ne voit pas comment cette Commission n° 1 aurait pu se prononcer en connaissance de cause sur le projet de délibération qui lui était soumis, alors même que ce Cahier des charges, élément essentiel pour apprécier l’intérêt communal de la cession et dont toutes les dispositions ne sont pas reprises dans la note de synthèse, n’était pas encore finalisé.

Il y avait donc là un vice de procédure substantiel, fort susceptible d'entacher la délibération attaquée.

 

Défaillances mnémoniques...

La chose était ennuyeuse, et Me Michel Aaron, avocat payé par la Ville, ou plutôt par le contribuable (alors que la Ville dispose d'un service juridique, et n'a pour contradicteurs que des non-spécialistes!), entreprit de « démontrer » que la Commission Développement, Attractivité et Prospective s'était « bien prononcée au visa du cahier des charges de la cession qui était joint au projet de délibération ».

En faisaient foi selon lui deux attestations (datées du 28 mars 2019) de membres de la commission (qui, rappelons-le, n'étaient que quatre le 12 juin 2018 à prendre part à ses travaux), Mmes Catherine PRADAL-CHAZARENC, première adjointe, et Nathalie BOURHIS, onzième adjointe, et vice-présidente de la commission.

Caen, place de la République, Joël BRUNEAU, Tribunal administratif de Caen, Malek REZGUI, Laurent CHEMLA, Règlement intérieur du Conseil municipal, commissions permanentes, Commission Développement Attractivité et Prospective, Me Michel Aaron, Mme Catherine Pradal-Chazarenc première adjointe, Mme Nathalie BOURHIS onzième adjointe (urbanisme), jugement du TA de Caen du 7 novembre 2019

(un clic sur les documents permet de les agrandir)

Caen, place de la République, Joël BRUNEAU, Tribunal administratif de Caen, Malek REZGUI, Laurent CHEMLA, Règlement intérieur du Conseil municipal, commissions permanentes, Commission Développement Attractivité et Prospective, Me Michel Aaron, Mme Catherine Pradal-Chazarenc première adjointe, Mme Nathalie BOURHIS onzième adjointe (urbanisme), jugement du TA de Caen du 7 novembre 2019

Ces attestations n'expliquent pas bien sûr de quelle nature pouvait être le document dont leurs signataires affirment avoir eu connaissance lors de la réunion de la Commission, quand la seule version de référence du Cahier des charges de cession n'a été signé par les parties (Ville et acquéreurs) que trois jours plus tard, devant notaire.

Le problème est aussi que ces deux attestations (strictement identiques, à l'exception de l'identité et des coordonnées des signataires) datent la réunion de la commission du 18 juin, quand celle-ci a réellement eu lieu le mardi 12 juin 2018, comme le montre le compte-rendu officiel, établi le 13, et portant la signature de Mme BOURHIS (voir en annexe).

On notera enfin que ces deux attestations sont semblablement agrémentées de la disposition habituelle en la matière : « Je suis avertie que cette attestation est destinée à être produite en justice, et qu'une fausse attestation de ma part m'exposerait à des sanctions pénales ».

 

Classement sans suites...

Pas de quoi émouvoir le rapporteur public et les autres magistrats de la 3ème chambre du Tribunal administratif de Caen, auxquels les grossières inexactitudes et l'insuffisance de ces attestations avaient été dûment signalées. Leur jugement du 7 novembre 2019 évite soigneusement toute référence aux défaillances mnémoniques de Mmes BOURHIS et PRADAL-CHAZARENC (concernant la date de la réunion à laquelle elles avaient pris part), et valide par contre les souvenirs précis qu'elles auraient eu de la présence au dossier du Cahier des charges de cession le jour de l'examen en commission du projet de délibération....

Sur ce point, voir en annexe le texte des points 2 à 5 de ce jugement (pages 3-4/10).

Mmes BOURHIS et PRADAL-CHAZARENC ne sont sans doute pas pour grand chose dans les semblables erreurs de date que comportent leurs « attestations » respectives, puisque leur seule participation personnelle à la rédaction de celles-ci semble bien s'être limitée à en compléter la date et à y apposer leur signature (ce qui n'est évidemment pas de nature à nous convaincre de la spontanéité et de l'originalité du témoignage). Mais, quoi qu'il en soit, on ne signe pas n'importe quoi, sans même relire...

 

Un toilettage du règlement s'impose

Compte tenu enfin du peu d'intérêt manifesté par les conseillers municipaux pour la participation aux réunions des commissions permanentes (cela peut se comprendre, s'agissant de réunions au modèle de celle dont il vient d'être question), comme de l'évidente inutilité des avis qu'elles rendent pour l'information des conseillers qui n'en font pas partie (cf. point 3 du jugement cité en annexe), on pourra légitimement conseiller à l'équipe arrivée en tête le 15 ou le 22 mars de faire procéder à un sérieux toilettage du Règlement du conseil municipal.

Tel que rédigé actuellement, et si l'on admet l'interprétation que donnent de son article 29 les magistrats du Tribunal administratif de Caen, il ne permet que simulacres de démocratie et perte de temps pour tout le monde. On comprend que M. Joël BRUNEAU et les siens aient trouvé la chose à leur goût. Mais on peut souhaiter que d'autres se montrent plus exigeants.

 

 

Annexes

Jugement du TA de Caen du 7 novembre 2019,

points 2 à 5 (pages 3-4/10)

Caen, place de la République, Joël BRUNEAU, Tribunal administratif de Caen, Malek REZGUI, Laurent CHEMLA, Règlement intérieur du Conseil municipal, commissions permanentes, Commission Développement Attractivité et Prospective, Me Michel Aaron, Mme Catherine Pradal-Chazarenc première adjointe, Mme Nathalie BOURHIS onzième adjointe (urbanisme), jugement du TA de Caen du 7 novembre 2019

Avis du 12 juin 2018 de la Commission Développement, Attractivité et Prospective

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Quel intérêt y aurait-il à remettre un exemplaire d'un « avis » de cette nature à chacun des membres du Conseil municipal avant la réunion de celui-ci (article 29 du Règlement intérieur du Conseil), puisque cet « avis » dépourvu de toute substance n'est porteur d'aucune information susceptible d'aider le conseiller municipal à se former une opinion sur les affaires qui lui sont soumises ?

 

 

 

 

 

 

 

samedi, 10 août 2019

« Projet République » à Caen, l'enjeu des 1000 euros

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L'enjeu des 1000 euros

Nous avons reçu le 25 juin, par courrier recommandé comme il se doit, la décision du Tribunal administratif de Caen concernant le recours en excès de pouvoir que nous avions introduit devant cette juridiction le 29 mars 2018 (suite au rejet d'un recours gracieux préalable) pour contester la légalité de la délibération du 6 novembre 2017 du conseil municipal de Caen.

Une délibération par laquelle celui-ci demandait l'autorisation d'abattre 49 tilleuls plantés depuis près de sept décennies sur la partie ouest de notre place de la République, entre la Poste, la Préfecture et la rue St Jean Eudes.

Le Tribunal administratif nous avait d'abord informé, par courrier LRAR du 5 juin, de sa décision d'examiner cette affaire, avec d'autres (relatives elles aussi à la question du devenir de la place de la République), lors d'une audience fixée au 20 juin. Mais, par une nouvelle lettre recommandée du 7 juin, il nous informait d'un renvoi d'audience à une séance ultérieure, sans autre précision.

 

Requête irrecevable après 15 mois d'instruction

Étrange changement de point de vue du Tribunal en quinze jours, après 15 mois d'instruction. Nous apprenions en effet le 25 juin qu'il n'y aurait pas de séance ultérieure, et que l'affaire avait été réglée par une Ordonnance datée du 21 juin 2019 (copie suivant liens ci-dessous), prise en application des dispositions de l'article R.222-1 du Code de justice administrative (CJA).

Notre requête était « manifestement irrecevable » car la délibération attaquée « simple acte préparatoire de l'autorisation sollicitée » n'avait « nullement pour effet de permettre l'enlèvement de ces arbres, une autorisation du préfet étant nécessaire... ». Cette autorisation (préfectorale) était donc la seule décision qu'il fût possible de contester (et l'a d'ailleurs été par un autre recours, non encore jugé).

L'Ordonnance précisait enfin que : « Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme Hergas la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Caen pour la présente instance » (art. L.761-1 du CJA).

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Le prix du droit à la contestation citoyenne

Cela valait-il donc la peine de contester la légalité de cette délibération du 6 novembre 2017, quand nous savions d'avance que l'hypothèse la plus probable était à terme le rejet de notre requête ? Sans doute, car faute de réaction (la nôtre, comme aussi le recours collectif dirigé contre la décision grossièrement illégale d'autorisation, prise d'autorité, le 19 janvier 2018, par M. LAPRIE-SENTENAC, Architecte des Bâtiments de France, en lieu et place du préfet) les tilleuls de la place auraient déjà disparu, des fouilles (inutiles mais fort coûteuses, de 300 000€ environ, aux frais du contribuable bien sûr) auraient déjà eu lieu, et on aurait peut-être déjà commencé à creuser le trou de ce nouveau parking souterrain que rien ne justifie, et surtout pas les réflexions menées à l'occasion des travaux d'élaboration (en cours) du nouveau Plan de prévention multirisques de la basse vallée de l'Orne (PPMR-BVO).

Enfin on ne passe pas des mois le nez dans un dossier de ce genre sans faire d'intéressantes découvertes, mettre à jour de troublantes connivences, et constater pièces à l'appui le fonctionnement concret du pouvoir (et souvent son envers obscur) dans un chef-lieu de département.

D'où l'intérêt que peut présenter un bref exposé de la situation.

 

Un projet rondement mené, et souvent sans vote

Le «Projet République» d'un grand centre commercial de quatre niveaux au-dessus d'un parking souterrain de 450 places, sur toute la superficie (un demi-hectare) d'un terrain en plein centre de Caen, planté d'une bonne cinquantaine de tilleuls quasi septuagénaires, ce projet privé confié par la municipalité aux sociétés de deux hommes d'affaires du cru (Conseil municipal du 25 juin 2018) ne sort certainement pas de nulle part. Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme, comme aurait dit paraît-il Antoine de Lavoisier. Mais là n'est pas la question aujourd'hui.

Rappelons seulement que l'idée de «halle gourmande» de la campagne électorale 2014 de M. Joël Bruneau et Mme Sonia de la Provôté avait officiellement pris une tout autre dimension dès sa réactivation par la délibération du conseil municipal du 29 juin 2015 (lancement d'une étude sur le commerce de centre-ville confiée en octobre au Cabinet Bérénice).

Huit mois plus tard, le 14 mars 2016, la municipalité présentait, sans vote, les résultats de cette étude au conseil municipal, et sortait illico de son chapeau un «appel à projets» tout ficelé, et ainsi conçu: remise des candidatures 3 mois plus tard (le 15 juin), offres définitives après auditions le 8 juillet, présentation de l'équipe lauréate au conseil municipal le 11 juillet.

Trois mois pour concevoir un projet économique et architectural répondant à toutes les exigences d'un cahier des charges très précis, c'était assurément bien court pour des «horsains». Mais rassurez-vous, car, comme le déclarait le 11 juillet 2016 M. Joël BRUNEAU lors d'une autre séance du conseil municipal : depuis juin 2015 « un certain nombre d'opérateurs sont venus nous rencontrer pour savoir dans quel esprit nous souhaitions lancer cet appel à projets ». Des opérateurs venus de loin, ou en voisins ? Seuls, ou avec de solides relations dans la place ? Des gens bien informés en tout cas, et ainsi tant soit peu en avance sur leurs concurrents...

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Archéologie et billard à 3 bandes

Rappelons également qu'à cette époque le fameux parking arboré n'était ni vendable (car appartenant au domaine public communal), ni constructible, car défini par le plan local d'urbanisme comme à usage d'espace vert et de parking (on ne détaillera pas ici comment ce terrain est devenu vendable et constructible, ni les épisodes des contestations, en cours, des délibérations qui ont permis qu'il le soit devenu)...

Qu'à cela ne tienne, car la mairie avait aussi, dès avant le 26 février 2016, saisi la préfecture de région (Service régional de l'archéologie), d'une « demande anticipée de prescription d'archéologie préventive (...) pour le projet « Place de la République » situé à Caen (14)... ».

Cette demande était donc logiquement arrivée à la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC), rue St Ouen à Caen, dans des services dont la bible est nécessairement le Code du patrimoine, et qui ne pouvaient donc ignorer la distinction fondamentale qui y est faite au Livre V entre fouilles préventives (Titre II) et fouilles programmées (Titre III).

Des services qui ne pouvaient pas non plus ignorer l'existence (et la sobre rédaction, immédiatement compréhensible par tout un chacun) de l'article R.523-3 de ce Code du patrimoine (Livre V Titre II), créé par le décret n° 2011-574 du 24 mai 2011 :

« Pour l'application du présent titre, sont dénommées :

a) "Aménageurs" les personnes qui projettent d'exécuter les travaux;

b) " Opérateurs " les personnes qui réalisent les opérations archéologiques. »

On vous épargnera la citation complète des articles R.523-12, R.523-17 et R.523-40, dont les dispositions ne sont pas inintéressantes, mais on n'omettra pas de signaler plus longuement que l'article R.523-14 prévoit que la demande anticipée de prescription est formulée par l'aménageur auprès du préfet), et que l'article R.523-41 indique sans équivoque que « Les opérations de fouilles archéologiques prescrites par le préfet de région (...) sont réalisées sous la maîtrise d'ouvrage de l'aménageur »).

 

La procédure, c'est pas le truc de la DRAC

Est-ce donc délibérément, et en complète méconnaissance de la procédure clairement exposée par ces dispositions du Code du patrimoine (détournement de procédure?), que la municipalité a envisagé, plus de six mois avant la désignation de l'aménageur (en octobre 2016) de se substituer à lui pour assurer la maîtrise d'ouvrage (et bien sûr le financement) du diagnostic archéologique (réalisé du 1er au 21 juin 2016) et des fouilles préventives qui pourraient être ultérieurement prescrites (et l'ont été par les deux arrêtés préfectoraux des 15 novembre 2016 et 19 juin 2017) ?

L'hypothèse de l'incompétence en matière de droit du patrimoine des services municipaux caennais est certes recevable (cela n'entre sans doute pas dans leurs attributions), mais la DRAC de Normandie et la préfecture de région ne pouvaient quant à elles ignorer les règles du Code du patrimoine applicables à la « demande anticipée... » de la Ville de Caen (notamment l'article R.523-14), puisque leur saisine par Mme Sonia de la Provôté alors adjointe à l'urbanisme (lettre du 18 février 2016) mentionnait bien un « futur acquéreur/constructeur », manifestait clairement par là que la Ville de Caen n'était pas l'aménageur, et n'avait dès lors pas qualité pour formuler auprès du préfet une demande anticipée de prescription de fouilles préventives.

L'arrêté n°16-2016-072 du 1er mars 2016 de Mme la préfète de la région Normandie « portant prescription d'un diagnostic d'archéologie préventive » (souscrit par délégation par le DRAC Jean-Paul OLLIVIER) était donc dépourvu de toute base juridique sérieuse, comme l'étaient par suite les deux autres arrêtés préfectoraux des 15 novembre 2016 et 19 juin 2017, prescrivant des fouilles complètes, le « décapage complet » du terrain « jusqu'au niveau d'apparition des vestiges »... et partant l'abattage des 49 tilleuls (objet de la délibération du 6 novembre 2017 que nous contestions).

Il s'ensuit que cette dernière délibération, fondée sur la prétendue obligation que faisaient à la Ville les arrêtés préfectoraux des 15 novembre 2016 et 19 juin 2017 prescrivant des fouilles, n'était à tout le moins que le produit (manifestement frelaté) d'une succession d'erreurs flagrantes de procédure (volontaires ou non).

 

Une « erreur », ça va,

Plusieurs, bonjour les dégâts !

Nul n'est parfait bien sûr, et les fonctionnaires de la DRAC peuvent bien sûr se tromper, y compris dans la lecture qu'ils font du Code du patrimoine, leur outil de travail. Mais de la multiplicité des erreurs naît le soupçon.

Car c'est au prix d'une nouvelle et grossière erreur que M. LAPRIE-SENTENAC, Architecte des Bâtiments de France (et membre du jury de sélection de l'appel à projets République), a répondu favorablement, le 19 janvier 2018, à la demande d'autorisation d'abattage des tilleuls de la place de la République, à la place du préfet, seul compétent.

La préfecture du Calvados a mis près de onze mois à reconnaître cette nouvelle erreur (cf. l'arrêté préfectoral de retrait du 7 décembre 2018, « Considérant que la décision du 19 janvier 2018 susvisée est entachée de vices de forme et de procédure, circonstance qui affecte sa légalité »), a ainsi procédé au retrait de la décision litigieuse en méconnaissance cette fois des dispositions de l'article L.242-1 du Code des relations entre le public et l'administration, qui ne permet semblable retrait que « dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision », et a enfin ré-autorisé l'abattage des tilleuls de la place par un dernier arrêté préfectoral daté du 5 février 2019 en « Considérant que les fouilles préventives permettent la mise en œuvre du programme de l'appel à projet qui prévoit de recomposer un îlot et de restituer une trame urbaine en rapport avec le caractère bâti originel des abords des monuments historiques ».

Ainsi, après des mois et des mois de débats sur la question des fouilles préventives qui incombent légalement à l'aménageur, et à lui seul, la préfecture accorde au vendeur du terrain (la Ville de Caen qui n'est pas l'aménageur) l'autorisation d'abattre les tilleuls pour lui permettre de réaliser à ses frais des fouilles qui ne lui incombent pas, afin de faire place nette au seul profit de l'aménageur (et permettre la mise en œuvre de son programme d'immobilier commercial, paré d'oripeaux culturels déplacés) ! On est curieux de savoir ce que le juge administratif pensera d'une telle motivation...

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Site inscrit et fouilles « spécifiques »...

Mais revenons rue St Ouen (à la DRAC). Nous avons pendant plus d'un an demandé à ce qu'on nous donne accès au dossier d'un document public, celui du Site inscrit du Centre ancien de Caen (arrêté ministériel du 5 janvier 1978 toujours en vigueur), sur lequel l'ancien parking arboré de la place de la République figure comme « espace planté à conserver et à compléter ». Il a fallu saisir la CADA de ce refus de communication, et cela même n'a pas suffi. Une ultime démarche auprès de l’Élysée, Matignon et différents ministères a quand même fini par débloquer la situation (voir http://caennaissivoussaviez.hautetfort.com/archive/2019/0...).

La DRAC, la Préfecture, le maire de Caen, entre autres (comme en attestent nombre de courriers en notre possession) ne souhaitaient manifestement pas que nous puissions avoir accès à ces documents, en méconnaissance flagrante des dispositions de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, instituant la liberté d'accès aux documents administratifs. Une bien étrange attitude, qu'il est certainement permis de rapprocher de celle qui a conduit la DRAC à méconnaître aussi les dispositions du Code du patrimoine relatives aux fouilles d'archéologie préventives... pour en confier la charge à la Ville de Caen à laquelle elles n'incombaient pas.

A ce propos (mais en sens inverse) on peut en outre s'interroger sur le peu d'empressement manifesté par la DRAC en octobre 2018 pour procéder à des fouilles sérieuses des vestiges des principaux bâtiments de l'ancien Hôtel de Ville de Caen, tous situés sur le domaine public municipal, à l'extérieur du terrain que M. BRUNEAU désire vendre (et qu'il faudrait décaper intégralement « jusqu'au niveau d'apparition des vestiges », et aux frais du contribuable bien entendu).

Dans une lettre figurant en annexe dans une note de ce blog (http://caennaissivoussaviez.hautetfort.com/archive/2018/0...), M. Jean-Paul OLLIVIER (patron de la DRAC de Normandie) va même jusqu'à inventer la catégorie des fouilles « spécifiques » (comprendre sans doute "vite expédiées") pour qualifier celles qui, à contrecœur, seront quand même entreprises au cours des semaines suivantes (car « le projet n'a pas donné lieu à une prescription d'archéologie préventive », bien entendu).

En somme les fouilles, c'est à la tête du client, et comme ça l'arrange (le client est roi). Et Joël BRUNEAU a une bonne tête...

 

Sur la bâche à sornettes...

Mais M. Joël BRUNEAU ne sait peut-être pas s'entourer des meilleurs spécialistes...

La bâche publicitaire dont il a affublé la palissade qui défigure notre place de la République depuis plus de deux ans et demi a été semble-t-il conçue par la Direction de la Communication de la Ville, et pour les textes par un certain Romain DESCLOS, guide conférencier à l'Abbaye aux Hommes. C'est du moins ce qui est écrit dessus (sur la bâche s'entend). Et, dans ces conditions, on ne pouvait guère s'attendre qu'à de la "communication", c'est à dire au mieux à de l'approximation, au pire à de la falsification.

La chose se vérifie, s'agissant de l'emplacement des vestiges de l'ancien Hôtel de Ville de Caen (l'ancienne maison des Eudistes, petit et grand séminaire autour de leur église). La bâche dont il vient d'être question (et dont on aimerait savoir quel prix elle a coûté) prétend notamment nous raconter l'histoire de la place de la République, du remblaiement d'une fraction de la Prairie au XVIème siècle à la place (et sa partie encore arborée) que nous connaissons aujourd'hui. On prend connaissance de la partie "historique" de ce discours municipal en remontant la rue Jean Eudes en direction de la Gloriette. Et ça commence assez mal. On tombe sans trop tarder sur un « plan du 17e siècle » (sic) dont tout indique qu'il date... d'après la Révolution, puisqu'on y trouve la mention de l'hôtel de ville et de la bibliothèque. Mais ce n'est pas là, peut-être, la bévue la plus énorme.

place de la République à Caen

Le plus inquiétant, si l'on tient absolument à prendre au sérieux tout ce que la municipalité raconte à propos de ce projet de privatisation de la place, c'est la surcharge de ce plan du XIXème par l'indication (entre deux traits verts) de l'emplacement occupé par la rue Georges Lebret depuis son percement dans les années trente du siècle dernier. La rue Lebret est ainsi censée occuper le terrain sur lequel est édifiée l'aile droite de l'hôtel Daumesnil, qui abrita jusqu'en 2015 le tribunal d'instance !

Deux belles bourdes qui mettent en évidence le niveau culturel élevé du service municipal de la communication (ou d'autres?), et surtout les difficultés insurmontables qu'on y éprouve pour faire une lecture correcte d'un plan parfaitement lisible.

Car on conviendra d'écarter l'hypothèse de la bourde volontaire, qui permettait de faire apparaître l'ensemble des vestiges de l'ancien Hôtel de Ville sur le seul terrain destiné à être vendu aux sociétés de MM. Laurent CHEMLA et Malek REZGUI (terrain promis à des fouilles préventives complètes), quand les vestiges des principaux bâtiments de l'ancien séminaire des Eudistes gisent sous le bitume de la voie publique entre les deux parties de la place. Là où, en octobre 2018, on souhaitait enterrer discrètement un énorme bassin de rétention des eaux pluviales (de 220 m3). Sans trop de souci du patrimoine archéologique...

Ce dossier du centre commercial voulu par M. Joël BRUNEAU est décidément plein de surprises, et l'on constate à cette occasion que la falsification est un des outils les plus utiles pour l'élaboration d'une "communication" efficace...

 

La République nous appelle...

Mais revenons à nos moutons. Avec cette première décision du tribunal administratif du 21 juin 2019, rejetant sans examen au fond (pour simple irrecevabilité) notre recours contre la délibération du 6 novembre 2017, nous avons certes perdu une bataille. Et sans doute de l'argent (1000 €).

Mais nous n'avons pas perdu notre temps, et en avons même gagné (nos tilleuls sont toujours debout, la commission départementale d’aménagement commercial -CDAC- n'a pas été saisie du projet, et aucun permis de construire n'a bien sûr été accordé, la Cour d'appel administrative ne s'étant par ailleurs toujours pas prononcée sur la question de la modification du plan local d'urbanisme et celle du déclassement du terrain).

Nous avons en outre appris des tas de choses, fort utiles pour nourrir notre argumentation dans les autres affaires relatives à ce même dossier (recours contre la vente du terrain, par délibération du 25 juin 2018, et recours contre la décision d'autorisation d'abattage des tilleuls de M. LAPRIE-SENTENAC, en date du 19 janvier 2018, et l'arrêté préfectoral du 5 février 2019 qui l'a remplacée).

Ces affaires devaient être examinées à l'audience du 20 juin. Elles le seront certainement après les vacances, en septembre ou plus tard...

S'agissant des 1000 euros que nous devons à M. Joël BRUNEAU, nous lui avons poliment demandé de nous faire crédit, par une lettre ouverte distribuée le 25 juin au Calvaire St Pierre (voir ci-dessous). Il ne nous a pour le moment rien réclamé, mais cela pourrait venir. Ce sera dans ce cas l'occasion d'une levée de fonds, levée en masse bien entendu, comme en 1793.

Tribunal administratif de Caen, place de la République à Caen, autorisation d'abattage de 49 tilleuls, article R.222-1 du Code de justice administrative (CJA), art. L.761-1 du CJA, Dominique LAPRIE-SENTENAC Architecte des Bâtiments de France, Jean-Paul OLLIVIER DRAC Normandie, Plan de prévention multirisques de la basse vallée de l'Orne (PPMR-BVO), Projet République, halle gourmande, Joël Bruneau maire de Caen, Sonia de la Provôté, Cabinet Bérénice, demande anticipée de prescription d'archéologie préventive, Direction régionale des affaires culturelles (DRAC), Code du patrimoine, Laurent CHEMLA Le Printemps, Malek REZGUI Sedelka

Tribunal administratif de Caen, place de la République à Caen, autorisation d'abattage de 49 tilleuls, article R.222-1 du Code de justice administrative (CJA), art. L.761-1 du CJA, Dominique LAPRIE-SENTENAC Architecte des Bâtiments de France, Jean-Paul OLLIVIER DRAC Normandie, Plan de prévention multirisques de la basse vallée de l'Orne (PPMR-BVO), Projet République, halle gourmande, Joël Bruneau maire de Caen, Sonia de la Provôté, Cabinet Bérénice, demande anticipée de prescription d'archéologie préventive, Direction régionale des affaires culturelles (DRAC), Code du patrimoine, Laurent CHEMLA Le Printemps, Malek REZGUI Sedelka

Tribunal administratif de Caen, place de la République à Caen, autorisation d'abattage de 49 tilleuls, article R.222-1 du Code de justice administrative (CJA), art. L.761-1 du CJA, Dominique LAPRIE-SENTENAC Architecte des Bâtiments de France, Jean-Paul OLLIVIER DRAC Normandie, Plan de prévention multirisques de la basse vallée de l'Orne (PPMR-BVO), Projet République, halle gourmande, Joël Bruneau maire de Caen, Sonia de la Provôté, Cabinet Bérénice, demande anticipée de prescription d'archéologie préventive, Direction régionale des affaires culturelles (DRAC), Code du patrimoine, Laurent CHEMLA Le Printemps, Malek REZGUI Sedelka

 

mardi, 28 décembre 2010

Serge VAUTIER réintégré au CHU, par décision au fond du tribunal administratif de Caen…

Le Caravage David tenant la tête de Goliath.jpg

Le Caravage (Michelangelo Merisi) David tenant la tête de Goliath (1605)

 VAUTIER-PIQUEMAL 3-0

Calme bloc ici-bas chu d’un désastre obscur,
Que ce granit du moins montre à jamais sa borne
Aux noirs vols du Blasphème épars dans le futur.

Mallarmé « Le tombeau d’Edgar Poe »

Après deux référés ordonnant la réintégration de Serge VAUTIER, le tribunal administratif de Caen statuant au fond a annulé le mercredi 22 décembre la décision du directeur du CHU de Caen, M. Angel PIQUEMAL, qui mettait à la retraite d’office ce salarié de l’hôpital (par ailleurs partie civile dans le procès de l’amiante dont il est truffé). Par cette décision, le tribunal administratif se refuse à suivre l’avis de son rapporteur public, M. Xavier MONDESERT, qui lui avait proposé, lors de l’audience du 10 décembre, de valider cette mise à la retraite d’office, une sanction qui ne lui semblait « pas disproportionnée » (voir ci-après le texte de la dépêche AFP du 10 décembre 2010).

AFP 10 décembre 2010 TA Caen CHU-VAUTIER.pdf

 

Sanction disproportionnée sur un seul témoignage…

Un semblable désaveu est chose fort rare. Selon le quotidien Ouest-France (article reproduit ci-dessous), le tribunal administratif considère en effet « qu’en prononçant la sanction de mise à la retraite d’office qui est, après la révocation, la sanction la plus grave qui puisse être infligée à un fonctionnaire, le directeur du centre hospitalier de Caen avait pris une sanction disproportionnée ».

Ouest-France poursuit ainsi : « La juridiction considère que les faits reprochés à l’intéressé n’étaient pas habituels et devaient être relativisés, un seul témoignage ayant été produit sur les propos menaçants ou injurieux tenus à l’encontre de son supérieur hiérarchique et de collègues. Le tribunal note également que l’établissement n’avait reçu aucune plainte des résidents ou de leur famille à l’égard de l’agent et qu’il n’était pas établi que le comportement de celui-ci aurait porté atteinte à l’image du centre hospitalier. »

Vautier-OF-annulation.jpg

 

Qui veut noyer son chien…

On ne peut que se féliciter de cette décision (au-delà même du cas particulier du CHU, dont le président du conseil d’administration est de droit Philippe DURON, comme on sait, sans oublier son adjoint Xavier LE COUTOUR, chef du service d’hygiène hospitalière). Ainsi, pour une fois, il ne suffira pas, pour noyer son chien, de l’accuser d’avoir la rage…

 

le sang pur pour tous ouest-éclair caen 12-11-1930.jpg

 

En complément, lien vers une vidéo datant d’août 2010 (Serge Vautier réintégré pour la seconde fois par décision en référé du TA de Caen)

http://www.youtube.com/watch?v=2jBVa_2i31Q

Et pour en savoir un peu plus sur l’amiante, en général

http://www.inrs.fr/inrs-pub/inrs01.nsf/intranetobject-acc...