jeudi, 21 février 2019
DRAC de Normandie, car tel est notre bon plaisir...
Les ukases du grand satrape
seraient-elles contagieuses?
On identifiera sans difficulté le texte dont sont extraites les lignes qui suivent :
« La société que nous voulons est une société dans laquelle (...) on ne devrait pas avoir besoin de relations ou de fortune, mais d'effort et de travail. (…) Comment voudriez-vous que l'État soit organisé et comment peut-il améliorer son action ? Faut-il revoir le fonctionnement de l'administration et comment ? (…) Quelles évolutions souhaitez-vous pour rendre la participation citoyenne plus active, la démocratie plus participative ? »
Je ne suis pas sûr d'avoir vocation à repenser de fond en comble l'organisation de l'Etat, le fonctionnement de l'administration, ou les modalités d'une participation citoyenne minimale.
Je pense par contre, beaucoup plus modestement, qu'il serait peut-être judicieux d'appliquer enfin les règles existantes, sans en inventer de nouvelles à tout propos, et par exemple, puisque c'est aujourd'hui une de mes préoccupations, de ne pas seulement considérer le Code des relations entre le public et l'administration comme un moyen pratique de caler les meubles boiteux.
Et de faire respecter par toutes les administrations les avis rendus par la Commission d'accès aux documents administratifs, autorité administrative indépendante créée en 1978, dont l'existence depuis tout ce temps ne peut trouver de justification que dans l'appui efficace qu'elle peut apporter aux citoyens en butte à l'arbitraire administratif.
Enfin, puisqu'un exemple concret vaut sans doute bien une savante dissertation, je joins à ce petit texte « participatif » (mais sans illusions) la copie d'une lettre adressée à M. Jean-Paul OLLIVIER, DRAC de Normandie, dont les services nous refusent depuis plus d'un an la communication d'un document public que la CADA n'a pu (évidemment) que déclarer communicable, par un avis du 8 novembre 2018.
Sommes-nous vraiment en République ? Attention à la marche...
Pour la lettre recommandée (du 21/02/2019) à M. J-P OLLIVIER, c'est ici:
LRAR Ollivier février 2019 Site inscrit.odt
16:47 Écrit par Bruno dans Affaires municipales, Du pouvoir et de son usage (ou de ses excès), La République n'est pas à vendre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : site inscrit du centre ancien de caen, arrêté ministériel du 5 janvier 1978, jean-paul ollivier, drac de normandie, dominique laprie-sentenac, architecte des bâtiments de france, commission d'accès aux documents administratifs (cada), adèle constan cellule documentation de la drac
dimanche, 23 septembre 2018
De l'intérêt variable des vestiges archéologiques, selon la DRAC... et la tête du client.
La place de l'archéologie ?
J'ai reçu hier 20 septembre une belle lettre (datée du 18) de M. Jean-Paul OLLIVIER, directeur régional des affaires culturelles (DRAC), lequel, comme le montre l'en-tête de ce courrier (copie en annexe ci-après), agit sous l'autorité de Mme la préfète de la région Normandie, à Rouen.
Il s'agissait pour lui de répondre à mon courrier recommandé du 11 septembre (lien en annexe là aussi), par lequel je lui signalais le risque de destruction de vestiges archéologiques, place de la République, à Caen.
Il faut peut-être préciser ici que toute destruction, dégradation ou détérioration du patrimoine archéologique (tel que défini à l'article L.510-1 du Code du patrimoine, contexte compris) met ses auteurs et responsables sous le coup des poursuites prévues au deuxièmement de l'article 322-3-1 du Code pénal (jusqu'à 7 ans de prison et 100.000€ d'amende).
Mais sans doute faut-il d'abord expliquer pourquoi je me suis vu dans l'obligation de saisir la DRAC de cette question.
Un important bassin de rétention
des eaux pluviales
C'est début octobre que vont vraiment commencer les travaux d'aménagement des espaces publics sur la place de la République et les rues adjacentes (permis d'aménager n° PA 014 118 18 U0003 accordé à la commune de Caen le 25 juin 2018 par M. Joël BRUNEAU, maire de Caen, sous réserve de respecter strictement l'avis du 15 juin 2018 de l'Architecte des Bâtiments de France, M. Dominique LAPRIE-SENTENAC, un avis bien sûr favorable et sans aucune réserve ou prescription particulière).
C'est dans le cadre de ces travaux que la Ville de Caen a décidé (comme je l'avais appris début juillet dernier) de réaliser un important bassin de rétention des eaux pluviales à proximité de la palissade ceinturant le terrain promis aux sociétés de MM. Laurent CHEMLA (Le Printemps) et Malek REZGUI (la nébuleuse bétonnière JEAN-SEDELKA).
Sachant que c'est là que gisent, entre les rues Paul Doumer et Georges Lebret, les vestiges de la façade de l'ancien hôtel de ville détruit en 1944 (séminaire et église des Eudistes jusqu'en 1792), et curieux de connaître les dimensions exactes de l'ouvrage prévu, la fonction qui lui était assignée, et sa localisation précise, j'adressai dès le 6 juillet un courriel à à la Maison du Tramway et des Grands Projets.
Rétention d'informations
J'appris ainsi sans difficultés que cet ouvrage était destiné à éviter de potentielles inondations, et qu'il était d'une capacité de 220 m3, pour une emprise au sol de 34m x 3m (sa réalisation nécessitant donc de creuser une tranchée de plus de 2,5m de profondeur, atteignant de ce fait des niveaux antérieurs aux premiers remblaiements du site aux XVIème et XVIIème siècles, c'est à dire en dessous des fondations des bâtiments de l'ancien hôtel de ville...).
Mais je n'eus plus jamais de réponse à mes autres questions, concernant notamment la localisation précise de l'ouvrage. On me répondit seulement, le 18 juillet, que les études étaient en cours, et les plans pas encore finalisés (un peu plus de deux mois avant le début des travaux!).
Je n'ai jamais eu de réponse à un nouveau courriel du 20 août, par lequel j'interrogeais cette même Maison du Tramway et des Grands Projets (c'est à dire le service de la communication de la mairie de Caen) pour savoir si les plans étaient enfin finalisés, s'agissant de travaux censés commencer début octobre...
J'ai alors (le 30 août) adressé un dernier courriel au maire de Caen, sur le même sujet, sans obtenir là non plus la moindre réponse. Secret défense, sans doute...
Un gros trou programmé dans les vestiges...
Si l'on ne voulait pas me répondre, c'est certainement parce que mes craintes étaient fondées, comme le confirme la lettre de M. Jean-Paul OLLIVIER (DRAC), dont le rédacteur est par ailleurs M. Karim GERNIGON, Conservateur régional de l'archéologie :
« La ville, dans le cadre de la requalification de l'ensemble des réseaux, a effectivement le projet de construire un bassin de rétention des eaux pluviales à un emplacement qui correspond très certainement à l'extrémité orientale de l'église de l'ancien séminaire des Eudistes. ».
Signalons en passant que la construction du bassin en question n'entre certainement pas dans le cadre de la requalification des réseaux, tant il est vrai qu'on ne requalifie que ce qui existe déjà. En fait, cette réalisation ex nihilo n'a sans doute d'autre but que de pallier les désordres auxquels on peut s'attendre, du fait de l'imperméabilisation programmée du terrain de l'ancien parking arboré (par le creusement d'un parking souterrain et la construction d'un centre commercial au-dessus). C'est donc là encore un nouveau cadeau consenti à MM. Laurent CHEMLA et Malek REZGUI, aux frais du contribuable bien entendu. Mais ces questions ne sont évidemment pas de la compétence des services de la DRAC Normandie...
… sans fouille préventive
C'est donc bien à l'emplacement du portail et/ou de la première travée de l'église des Eudistes qu'on creusera début octobre. Et certainement aussi à droite et/ou à gauche de ce portail (dans les fondations du petit et/ou du grand séminaire), car le « trou » sera creusé sur plus de 34m de longueur, parallèlement à la voie actuelle entre les rues Doumer et Lebret.
Ceci sans la réalisation au préalable d'une fouille un peu sérieuse de ce site (de superficie pourtant très limitée), qui sera ainsi définitivement détruit...
C'est en effet, nous dit-on, « compte tenu de leur localisation et de la très fréquente réutilisation de réseaux existants » qu'il n'y a pas eu de prescription d'archéologie préventive. Voilà une explication qui ne me satisfait guère. Qu'entend-on par là ? Qu'on connaît la localisation des réseaux, et qu'on sait le site déjà bouleversé par ceux-ci ?
Vérité en-deçà de la palissade, erreur au-delà
Mais, deux ans et demi plus tôt, quand le même DRAC (M. OLLIVIER) signait (le 1er mars 2016, et à la demande de la Ville de Caen) un arrêté prescrivant une « opération de diagnostic archéologique » sur le site du parking arboré (la moitié de place publique que la municipalité a promis le 25 juin dernier de vendre à MM. CHEMLA et REZGUI), on connaissait tout aussi parfaitement la présence, partout sur ce terrain, d'une multiplicité de réseaux enterrés (sans compter ceux dont on ignorait l'existence).
Des réseaux qui avaient évidemment bouleversé le site dans son ensemble, et rendaient peu prometteuses les fouilles envisagées. C'est ainsi que ce diagnostic accoucha, entre autres petites choses, d'un compteur à gaz affichant paraît-il la date et l'heure de son anéantissement, débris assurément photogénique, et très médiatisé (la communication, c'est savoir se servir de ce que l'on a sous la main, quand bien même ce serait dérisoire, et d'en faire quelque chose d'intéressant).
Mais le maigre bilan de ce diagnostic n'empêcha pas le même Jean-Paul OLLIVIER de signer deux arrêtés préfectoraux successifs, les 15 novembre 2016 et 19 juin 2017, prescrivant des fouilles préventives (par « décapage complet jusqu'au niveau d'apparition des vestiges ») sur la partie du site de l'ancien Hôtel de Ville de Caen... située à l'intérieur des palissades !
Le premier objectif des fouilles ainsi prescrites était de mettre au jour les vestiges de l'ancien séminaire des Eudistes et de leur église, devenu l'Hôtel de Ville de Caen dès 1792. Or il se trouve que les premiers et principaux bâtiments du séminaire des Eudistes, et la première travée de leur église, ont été édifiés au-delà de la palissade qui ceinture actuellement le terrain concerné par la prescription de fouilles.
Ainsi, s'il fallait ne fouiller qu'une partie du site, ce serait plutôt la partie en dehors de la palissade qu'il faudrait fouiller, et non l'inverse, comme le veut la Direction Régionale des Affaires Culturelles...
Les amis de nos amis sont nos amis...
Mais il ne faut sans doute pas trop accabler les services de la DRAC pour cette inconséquence manifeste, car « La DRAC – service régional de l'archéologie, a été très tôt interrogée par les services de la Ville de Caen sur l'impact des réseaux sur le patrimoine archéologique... ».
Notons incidemment que la Ville "informe" la DRAC, mais refuse d'informer les Caennais, quand ils se mêlent de ce qui les regarde...
La Ville a donc "informé" la DRAC, l'assurant sans doute qu'il n'y avait rien à voir à l'endroit prévu pour la création du bassin de rétention, des décennies de multiples travaux sur les réseaux ayant selon elle vraisemblablement détruit les vestiges, ou les avaient tellement bouleversés qu'il en étaient devenus illisibles. Tout en assurant la DRAC qu'elle l'informerait « des éventuelles découvertes de maçonneries anciennes »...
Bonne fille, la DRAC a bien voulu avaler ces sornettes, et considérer que deux secteurs contigus d'un même site archéologique pouvaient appeler des traitements diamétralement opposés (fouilles, ou pas). Il y suffisait d'une palissade.
D'un côté de cette palissade, la Ville prendrait généreusement à sa charge le financement des fouilles incombant aux futurs propriétaires du terrain (MM. CHEMLA et REZGUI), de l'autre (sur l'espace public) elle serait dispensée de fouilles...
« une opération archéologique spécifique »
Pour avoir été si bonne avec MM. CHEMLA et REZGUI, la Ville méritait bien d'être dispensée de ces fouilles. La DRAC n'en resterait pas moins vigilante, bien entendu... Un lot de consolation pour ceux qui estimeraient la "dispense" trop généreusement accordée ?
La construction du fameux bassin de rétention des eaux pluviales « plus important que prévu » (tiens donc) fera ainsi l'objet d'une « opération archéologique spécifique en relation étroite avec le service archéologie du Calvados » (les inventeurs du compteur à gaz dont il a été question plus haut, et des statues géantes gisant dans les caves de l'ancien musée des beaux-arts).
Il faut donc s'attendre à voir au mois d'octobre M. Vincent HINCKER ou l'un(e) de ses collègues sur le chantier de la place de la république, surveillant jalousement les manœuvres du godet de la pelleteuse au fond du trou, un trou plein de caves là encore, comme on le voit sur un plan de 1950...
J'ai assisté à une scène de ce genre il y a plus de 30 ans, dans la Cour des imprimeurs, à Caen. Le distingué préposé à la surveillance de la pelleteuse se contenta d'examiner de loin le contenu d'un godet (c'était une cave là encore), et décréta illico qu'il n'y avait pas lieu de poursuivre les recherches. Cette opération archéologique spécifique n'avait pas duré plus d'un quart d'heure. Il est vrai que, en pleine OPAH du Centre-Ancien, le chantier de réhabilitation de l'immeuble (classé MH) avait déjà pris du retard, et que l'architecte qui s'en occupait (et l'a affublé d'une étrange toiture en forme de pyramide tronquée) faisait office à l'époque d'Architecte des bâtiments de France...
Annexes
LRAR au DRAC 11 septembre 2018.pdf
et voici la réponse:
18:38 Écrit par Bruno dans Affaires municipales, La République n'est pas à vendre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jean-paul ollivier, directeur régional des affaires culturelles (drac), destruction de vestiges archéologiques, article 322-3-1 du code pénal, archéologie préventive, place de la république caen, rue paul doumer, rue georges lebret, joël bruneau, maire de caen, dominique laprie-sentenac, laurent chemla (le printemps), malek rezgui (groupe immoblier jean-sedelka), séminaire et église des eudistes, maison du tramway et des grands projets, karim gernigon conservateur régional de l'archéologie, vincent hincker, cour des imprimeurs