jeudi, 24 septembre 2020
« Après nous le déluge », ou l'avis de la chouette équipe de Joël BRUNEAU sur la nouvelle mouture du plan de prévention des risques, inondations et submersion marine...
« Après nous le déluge »
... ou l'avis de la chouette équipe de Joël BRUNEAU (représentant 18,99% des électeurs inscrits à Caen) sur la nouvelle mouture du plan de prévention des risques (PPR) concernant notre ville, et l'ensemble de la basse vallée de l'Orne.
Avec, par ordre d'intervention au micro, Jojo lui-même, l'adjoint Nicolas ESCACH (la Macronie locale), Francis JOLY pour la minorité Caen écologiste et citoyenne, Nicolas JOYAU (adjoint aux permis de construire), Ludwig WILLAUME (adjoint aux « espaces publics », qu'est-ce-là?), et Béatrice HOVNANIAN, autre conseillère d'opposition écolo-citoyenne...
La vidéo intégrale du conseil municipal du lundi 14 septembre 2020 (à votre disposition ci-dessous) a une durée totale d'environ 4 heures ¾ (pour plus de 50 questions à l'ordre du jour)... mais il suffira aux plus curieux d'entre vous d'une vingtaine de minutes pour apprendre ce qu'on veut bien vous dire (ou vous cacher) sur les risques d'inondation à Caen, y compris sur la place de la République.
Pour ce faire, pousser le curseur à 4h 21mn et 55 secondes.
Il s'agissait donc pour le conseil municipal, ce 14 septembre 2020 (question n° 52), de « prendre acte de l'avis favorable de la Ville de Caen »... rendu plusieurs semaines plus tôt (le 24 août) ! Et semble-t-il « agrémenté d'observations »... sans aucune consultation des groupes de l'opposition (des conseillers au rabais sans doute, et dont l'avis ne compte pas). « Il nous reste juste à participer à l'enquête publique pour nous exprimer et faire remonter nos remarques » (Francis JOLY). C'est beau la démocratie!
Une enquête publique qui aura lieu du 12 octobre au 12 novembre, comme nous venons de l'apprendre. Des précisions en suivant ces liens :
http://www.calvados.gouv.fr/IMG/pdf/20200918__avis_presse_ep-2.pdf
http://www.calvados.gouv.fr/IMG/pdf/2020-09-18_ap_o_ep_pprm_bvo-1-2.pdf
On pourra notamment rencontrer les membres de la Commission d'enquête à la mairie de Caen le mercredi 28 octobre... de 16h00 à 18h00 ! Un peu court, non ?
Nicolas ESCACH au rapport...
Ça commence par 7 minutes d'aimable bavardage (passablement technocratique) de Nicolas ESCACH, rappelant qu'on (au nom de la seule majorité) « a émis un certain nombre d'observations »... dont on ne saura évidemment rien de précis ce soir-là.
On nous refait seulement l'histoire du PPR Inondations, de ses origines (la crue de 1995) et sa révision de 2008, à l'actuel projet... appelé à être immédiatement mis en révision, car « pour le moment on ne prend pas en compte l'effet cocktail » (cumul des effets d'une crue de l'Orne et d'un coefficient de marée important, comme en 1995), et on se fonde par ailleurs sur une hausse de 60cm du niveau marin à 100 ans (hypothèse paraissant exagérément optimiste, même aux yeux de M. ESCACH). L'orateur se montre par contre très généreux en incantations et banalités sans conséquences, comme « assurer la sécurité », « limiter la vulnérabilité des biens et des personnes », ou « améliorer la culture du risque »...
La question de Francis JOLY
C'est alors à l'opposition qu'il revient de s'exprimer à son tour, en 3 grosses minutes (de 4h 29' 30'' à 4h 32' 57'').
Francis JOLY rappelle d'abord l'existence d'un projet de règlement du 30 août 2017 qui « prévoyait d'interdire les sous-sols dans toute une partie du centre-ville de Caen », y compris bien sûr la place de la République. Il constate que cette disposition ne figure plus dans le plan de prévention (on sait pourquoi, je pense...).
Il souligne l'insuffisance de ce plan, qui ne prend pas en compte le fameux « effet cocktail », et se fonde sur une hausse du niveau marin limitée à 60cm, quand le dernier numéro de « Tous Normands », revue mensuelle de la Région, consacre ses pages 24 et 25 aux travaux du GIEC normand, qui estime la montée du niveau de la mer en 2100 dans la fourchette 0,4m-1,10m, et prévoit jusqu'à 10% supplémentaires de précipitations intenses générant des inondations.
Il évoque donc aussi les épisodes orageux, comme celui de 2013, qui avait provoqué des inondations (hors saison), notamment dans le quartier de la gare et celui de la Préfecture. Et termine sur les considérations relatives au respect dû aux élus de la minorité dont il a été question plus haut.
Presqu'île et République,
ou l'art d'enfumer les blaireaux...
Réponse dans la foulée de Nicolas ESCACH : « Les chiffres qui sont donnés en submersion marine, c'est pas nous qui les fixons, c'est l’État... Ces mesures sont appelées à être rehaussées... Concernant la place de la République (…) les crues centennales (…) ces grandes crues qui arrivent une fois tous les 100 ans, et qui sont des crues un peu exceptionnelles, et effectivement la seule fois où la place de la République a été inondée, c'était en 1925-1926... »
(Un bref aparté, si vous le permettez. Désolé pour M. ESCACH, qui n'est sans doute pas hydrologue -moi non plus-, les « crues centennales » ne sont pas celles qui arrivent une fois tous les 100 ans, mais celles dont la probabilité d'apparition sur une année est de 1/100, en termes de débit. On peut ainsi parfois constater la survenue de plus d'une crue centennale en un siècle. On connaît même le cas de la Thaya, affluent de la Morava, qui s'est permis 2 crues de ce type en mars et juin de la même année 2006).
Donc « … Si on prend en compte cette crue centennale, il y a un risque d'inondation sur la place de la République » (4h 34' 10''). Ah, quand même...
N. ESCACH convient par ailleurs que des mesures sont prises pour éviter les parkings souterrains sur la Presqu'île, mais « les problématiques ne sont pas du tout les mêmes sur une partie de la Presqu'île et sur la place de la République ».
Bon, mais alors pourquoi les documents de suivi de l'élaboration de ce PPR montrent-ils que l’État (la DDTM) prétendait en 2016 interdire tout sous-sol dans le centre-ville et la Presqu'île, pour des raisons bien compréhensibles de sécurité des personnes et des biens, et pourquoi montrent-ils aussi très clairement que c'est par exception, et sous la pression des représentants de la Ville, que la DDTM a finalement consenti à autoriser le parking du « Projet République »? N. ESCACH connaît-il son sujet? Ou plutôt ment-il par omission? Il semble surtout satisfait de ce que ce PPRM, aussi bancal soit-il, « va être aussitôt révisé avec un temps beaucoup plus long de 3 ans ». Trois ans, le temps de faire passer les projets contestables qu'il autorise ?
Bonne année 1926, Monsieur le Préfet!
Après Prof, au tour de Joyeux.
La farce continue avec l'intervention d'à peine une minute de Nicolas JOYAU (à 4h 36' 37''), manifestement pas volontaire pour cette prise de parole, et qui se contente de rappeler les travaux entrepris à l'initiative du Syndicat de lutte contre les inondations (percement du chenal Victor Hugo, déversoir du Maresquier, etc.), grâce auxquels (c'est bien la moindre des choses) « la capacité d'évacuation des crues aujourd'hui est bien supérieure à ce qu'elle était... ». Jadis... ou il y a déjà 25 ans.
L'orageux Monsieur Bruneau,
ou les vaseux communicants
Joël BRUNEAU coupe alors la parole à son adjoint pour morigéner F. JOLY, insuffisamment attentif à son goût (innocente mise en scène du maître d'école sermonnant l'élève indiscipliné, tutoiement à l'appui, bien sûr), puis y va de son couplet sur le précédent de l'orage de juillet 2013 :
« Je ne suis pas hydrologue, loin de là (4h 37' 47''), mais par observation de la nature, telle qu'elle est vraiment, il ne faut pas confondre la submersion et l'inondation liée à un amas brutal d'eau, un orage, en clair. (…) Quand vous avez 60 millimètres de flotte comme cette fois-ci en 35 minutes (…) 80 ou 100 millimètres en un peu moins d'une heure, vous pouvez faire tout ce que vous voulez, il y a un sujet de trop-plein qui arrive. Le fait est que si l'on a régulièrement des phénomènes climatiques brutaux qui sont plus assimilables à des climats tropicaux qu'à des climats océaniques dont on devrait normalement relever, très clairement, l'eau elle va du point haut vers le point bas, et quand il y a beaucoup d'eau en même temps dans un laps de temps court, le point bas déborde (…) les phénomènes de crue, c'est encore autre chose (…) on est sur des sujets différents ». Voire.
Joël BRUNEAU est sans doute trop modeste, pas hydrologue peut-être (c'est lui qui le dit), mais il maîtrise les bases (le point haut, et le point bas, où se produit le débordement). Il est même un observateur attentif du changement climatique auquel on doit ces « phénomènes climatiques brutaux » dont il constate le retour régulier (comme l'orage de juillet 2013). Mais on ne pourrait selon lui rien y faire... si ce n'est laisser se creuser des parkings souterrains?
"Il n'y a rien à faire, c'est la nature!"
Ça patauge pas mal, à la mairie...
Un blanc. L'occasion de jeter un œil sur l'image (fixe et sans intérêt depuis le début), et sur le geste de la main de Nicolas ESCACH, à 4H 39' 03'' (allez, allez, on enchaîne !)...
Et Jojo d'enchaîner : « C'est assez rare qu'il y ait à la fois, euh, on est dans des temps climatiques différents, l'inondation c'est effectivement les pluies plutôt hivernales avec en même temps conjuguée avec la remontée, enfin ici à Caen avec les marées hautes, hein, qui seront effectivement encore plus hautes demain, c'est clair, et donc un phénomène cumulatif... ». C'est clair ?
Quelques bafouillages plus loin, on apprend enfin que « des travaux d'anticipation sont en cours (…) de renaturation d'un certain nombre d'espaces le long de l'Orne (...) en allant vers la baie » par ouverture des digues, permettant la création de champs d'inondation.
En aval de Caen donc... Quel effet sur les inondations chez nous ? Aucun... Il est vraiment temps que ça se termine !
Ludwig a un tuyau !
4h 40' 09'', Ludwig WILLAUME tient à mettre son grain de sel dans cette salade : « … En 1925, ni le Grand Odon, ni la Noé n'étaient couvertes... ». En voilà un qui n'a jamais eu une aussi belle occasion de se taire. Car en quoi la canalisation de ces cours d'eau il y a 100 ans a-t-elle réduit les effets d'une crue, comme celle de 1995 ? Quand les tuyaux ne sont pas assez gros, ça déborde, comme dit Jojo (point haut, point bas, et voilà « le trop-plein qui arrive.. »).
Caen sur Orne, Odon & Co en 1874
Culture, ou goût du risque ?
On en arrive justement, moins d'une minute plus tard, à l'intervention de Béatrice HOVNANIAN, qui reprenant une partie, restée sans réponse, de la question de son collègue JOLY, se demande ce qui a été fait à Caen pour accroître la « culture du risque », de 2016 à aujourd'hui.
Réponse du maire : « Effectivement, je n'ai pas répondu, pardonnez-moi. Pour ne donner qu'un exemple (…) Il y a eu x présentations au grand public sur le projet Presqu'île, qui justement, à chaque fois, revient sur ce sujet là ». Suit l'évocation de travaux, à Tours dans les années 2000, où l'on a utilisé 1,5 à 2m de « remblais pour rehausser un espace qui était effectivement inondable pour qu'il ne le soit plus. A contrario, sur la Presqu'île, on ne cherche pas à se protéger des inondations, on cherche à éviter qu'en cas d'inondation il y ait des victimes, donc des rez-de-chaussée qui ne sont pas habités (…) ça, ça participe à appréhender la culture du risque ».
Ah oui, pas d'habitants au rez-de-chaussée sur la Presqu'île, mais des clients au premier sous-sol d'un centre commercial place de la République, et 450 places en dessous pour y noyer leurs bagnoles ? Dans une zone exactement de même type : prairies humides, voire marécages (remblayés au XVIème siècle), avec la nappe phréatique affleurante, à 1,5-2 mètres au-dessous du sol actuel...
Le retour de l'acculturé...
Revoilà en effet Nicolas JOYAU, pour finir: «... Nos collectivités se sont engagées dans le dispositif Adapto qu'avait piloté le Conservatoire du Littoral pour sensibiliser (...) dans un premier temps les acteurs du territoire (...) Il y a effectivement des mesures qui sont régulièrement mises en œuvre (...) pour acculturer le grand public, les acteurs du territoire, élus, aménageurs, promoteurs à cet enjeu-là. Et les travaux qui ont été menés sur la presqu'île ont fait part de ce risque qu'il pouvait y avoir. Le Projet Presqu'île prévoit à la fois des aménagements, et prévoira aussi toute une communication sur le sujet... », etc., etc. « et je ne vois pas pourquoi il y a à polémiquer ce soir sur l'adaptation de ce document ».
Polémiquer ? La question des inondations, et de la sécurité des personnes et des biens au cours des années à venir, était-elle donc à ce point secondaire qu'on pouvait en reléguer l'examen après quatre heures de débats, en toute fin de conseil ? La minorité n'a par ailleurs eu la parole qu'au mieux 5 minutes, les collègues du petit Nicolas, lui-même, et leur maître à tous un bon quart d'heure.
On conseillera à ces gens-là de lire attentivement l'article L.2121-29 du Code général des collectivités territoriales : « Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune. Il donne son avis toutes les fois que cet avis est requis par les lois et règlements, ou qu'il est demandé par le représentant de l’État dans le département... ». Le conseil municipal n'est pas une chambre d'enregistrement et les élus de la minorité y disposent des mêmes droits et devoirs que leurs collègues.
En ce qui concerne « ADAPTO-Estuaire de l'Orne, Stratégie d'intervention 2015-2050 », on trouvera d'utiles informations en suivant ce lien
http://www.caen-metropole.fr/sites/default/files/presenta...
19:05 Écrit par Bruno dans Affaires municipales, La République n'est pas à vendre, Urbanisme et logement | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : conseil municipal de caen, joël bruneau, nicolas escach, francis joly, nicolas joyau, ludwig willaume, béatrice hovnanian, enquête publique du 12 octobre au 12 novembre 2020, place de la république caen, giec normand, crue centennale, plan de prévention multi-risques de la basse vallée de l'orne (i
dimanche, 23 septembre 2018
De l'intérêt variable des vestiges archéologiques, selon la DRAC... et la tête du client.
La place de l'archéologie ?
J'ai reçu hier 20 septembre une belle lettre (datée du 18) de M. Jean-Paul OLLIVIER, directeur régional des affaires culturelles (DRAC), lequel, comme le montre l'en-tête de ce courrier (copie en annexe ci-après), agit sous l'autorité de Mme la préfète de la région Normandie, à Rouen.
Il s'agissait pour lui de répondre à mon courrier recommandé du 11 septembre (lien en annexe là aussi), par lequel je lui signalais le risque de destruction de vestiges archéologiques, place de la République, à Caen.
Il faut peut-être préciser ici que toute destruction, dégradation ou détérioration du patrimoine archéologique (tel que défini à l'article L.510-1 du Code du patrimoine, contexte compris) met ses auteurs et responsables sous le coup des poursuites prévues au deuxièmement de l'article 322-3-1 du Code pénal (jusqu'à 7 ans de prison et 100.000€ d'amende).
Mais sans doute faut-il d'abord expliquer pourquoi je me suis vu dans l'obligation de saisir la DRAC de cette question.
Un important bassin de rétention
des eaux pluviales
C'est début octobre que vont vraiment commencer les travaux d'aménagement des espaces publics sur la place de la République et les rues adjacentes (permis d'aménager n° PA 014 118 18 U0003 accordé à la commune de Caen le 25 juin 2018 par M. Joël BRUNEAU, maire de Caen, sous réserve de respecter strictement l'avis du 15 juin 2018 de l'Architecte des Bâtiments de France, M. Dominique LAPRIE-SENTENAC, un avis bien sûr favorable et sans aucune réserve ou prescription particulière).
C'est dans le cadre de ces travaux que la Ville de Caen a décidé (comme je l'avais appris début juillet dernier) de réaliser un important bassin de rétention des eaux pluviales à proximité de la palissade ceinturant le terrain promis aux sociétés de MM. Laurent CHEMLA (Le Printemps) et Malek REZGUI (la nébuleuse bétonnière JEAN-SEDELKA).
Sachant que c'est là que gisent, entre les rues Paul Doumer et Georges Lebret, les vestiges de la façade de l'ancien hôtel de ville détruit en 1944 (séminaire et église des Eudistes jusqu'en 1792), et curieux de connaître les dimensions exactes de l'ouvrage prévu, la fonction qui lui était assignée, et sa localisation précise, j'adressai dès le 6 juillet un courriel à à la Maison du Tramway et des Grands Projets.
Rétention d'informations
J'appris ainsi sans difficultés que cet ouvrage était destiné à éviter de potentielles inondations, et qu'il était d'une capacité de 220 m3, pour une emprise au sol de 34m x 3m (sa réalisation nécessitant donc de creuser une tranchée de plus de 2,5m de profondeur, atteignant de ce fait des niveaux antérieurs aux premiers remblaiements du site aux XVIème et XVIIème siècles, c'est à dire en dessous des fondations des bâtiments de l'ancien hôtel de ville...).
Mais je n'eus plus jamais de réponse à mes autres questions, concernant notamment la localisation précise de l'ouvrage. On me répondit seulement, le 18 juillet, que les études étaient en cours, et les plans pas encore finalisés (un peu plus de deux mois avant le début des travaux!).
Je n'ai jamais eu de réponse à un nouveau courriel du 20 août, par lequel j'interrogeais cette même Maison du Tramway et des Grands Projets (c'est à dire le service de la communication de la mairie de Caen) pour savoir si les plans étaient enfin finalisés, s'agissant de travaux censés commencer début octobre...
J'ai alors (le 30 août) adressé un dernier courriel au maire de Caen, sur le même sujet, sans obtenir là non plus la moindre réponse. Secret défense, sans doute...
Un gros trou programmé dans les vestiges...
Si l'on ne voulait pas me répondre, c'est certainement parce que mes craintes étaient fondées, comme le confirme la lettre de M. Jean-Paul OLLIVIER (DRAC), dont le rédacteur est par ailleurs M. Karim GERNIGON, Conservateur régional de l'archéologie :
« La ville, dans le cadre de la requalification de l'ensemble des réseaux, a effectivement le projet de construire un bassin de rétention des eaux pluviales à un emplacement qui correspond très certainement à l'extrémité orientale de l'église de l'ancien séminaire des Eudistes. ».
Signalons en passant que la construction du bassin en question n'entre certainement pas dans le cadre de la requalification des réseaux, tant il est vrai qu'on ne requalifie que ce qui existe déjà. En fait, cette réalisation ex nihilo n'a sans doute d'autre but que de pallier les désordres auxquels on peut s'attendre, du fait de l'imperméabilisation programmée du terrain de l'ancien parking arboré (par le creusement d'un parking souterrain et la construction d'un centre commercial au-dessus). C'est donc là encore un nouveau cadeau consenti à MM. Laurent CHEMLA et Malek REZGUI, aux frais du contribuable bien entendu. Mais ces questions ne sont évidemment pas de la compétence des services de la DRAC Normandie...
… sans fouille préventive
C'est donc bien à l'emplacement du portail et/ou de la première travée de l'église des Eudistes qu'on creusera début octobre. Et certainement aussi à droite et/ou à gauche de ce portail (dans les fondations du petit et/ou du grand séminaire), car le « trou » sera creusé sur plus de 34m de longueur, parallèlement à la voie actuelle entre les rues Doumer et Lebret.
Ceci sans la réalisation au préalable d'une fouille un peu sérieuse de ce site (de superficie pourtant très limitée), qui sera ainsi définitivement détruit...
C'est en effet, nous dit-on, « compte tenu de leur localisation et de la très fréquente réutilisation de réseaux existants » qu'il n'y a pas eu de prescription d'archéologie préventive. Voilà une explication qui ne me satisfait guère. Qu'entend-on par là ? Qu'on connaît la localisation des réseaux, et qu'on sait le site déjà bouleversé par ceux-ci ?
Vérité en-deçà de la palissade, erreur au-delà
Mais, deux ans et demi plus tôt, quand le même DRAC (M. OLLIVIER) signait (le 1er mars 2016, et à la demande de la Ville de Caen) un arrêté prescrivant une « opération de diagnostic archéologique » sur le site du parking arboré (la moitié de place publique que la municipalité a promis le 25 juin dernier de vendre à MM. CHEMLA et REZGUI), on connaissait tout aussi parfaitement la présence, partout sur ce terrain, d'une multiplicité de réseaux enterrés (sans compter ceux dont on ignorait l'existence).
Des réseaux qui avaient évidemment bouleversé le site dans son ensemble, et rendaient peu prometteuses les fouilles envisagées. C'est ainsi que ce diagnostic accoucha, entre autres petites choses, d'un compteur à gaz affichant paraît-il la date et l'heure de son anéantissement, débris assurément photogénique, et très médiatisé (la communication, c'est savoir se servir de ce que l'on a sous la main, quand bien même ce serait dérisoire, et d'en faire quelque chose d'intéressant).
Mais le maigre bilan de ce diagnostic n'empêcha pas le même Jean-Paul OLLIVIER de signer deux arrêtés préfectoraux successifs, les 15 novembre 2016 et 19 juin 2017, prescrivant des fouilles préventives (par « décapage complet jusqu'au niveau d'apparition des vestiges ») sur la partie du site de l'ancien Hôtel de Ville de Caen... située à l'intérieur des palissades !
Le premier objectif des fouilles ainsi prescrites était de mettre au jour les vestiges de l'ancien séminaire des Eudistes et de leur église, devenu l'Hôtel de Ville de Caen dès 1792. Or il se trouve que les premiers et principaux bâtiments du séminaire des Eudistes, et la première travée de leur église, ont été édifiés au-delà de la palissade qui ceinture actuellement le terrain concerné par la prescription de fouilles.
Ainsi, s'il fallait ne fouiller qu'une partie du site, ce serait plutôt la partie en dehors de la palissade qu'il faudrait fouiller, et non l'inverse, comme le veut la Direction Régionale des Affaires Culturelles...
Les amis de nos amis sont nos amis...
Mais il ne faut sans doute pas trop accabler les services de la DRAC pour cette inconséquence manifeste, car « La DRAC – service régional de l'archéologie, a été très tôt interrogée par les services de la Ville de Caen sur l'impact des réseaux sur le patrimoine archéologique... ».
Notons incidemment que la Ville "informe" la DRAC, mais refuse d'informer les Caennais, quand ils se mêlent de ce qui les regarde...
La Ville a donc "informé" la DRAC, l'assurant sans doute qu'il n'y avait rien à voir à l'endroit prévu pour la création du bassin de rétention, des décennies de multiples travaux sur les réseaux ayant selon elle vraisemblablement détruit les vestiges, ou les avaient tellement bouleversés qu'il en étaient devenus illisibles. Tout en assurant la DRAC qu'elle l'informerait « des éventuelles découvertes de maçonneries anciennes »...
Bonne fille, la DRAC a bien voulu avaler ces sornettes, et considérer que deux secteurs contigus d'un même site archéologique pouvaient appeler des traitements diamétralement opposés (fouilles, ou pas). Il y suffisait d'une palissade.
D'un côté de cette palissade, la Ville prendrait généreusement à sa charge le financement des fouilles incombant aux futurs propriétaires du terrain (MM. CHEMLA et REZGUI), de l'autre (sur l'espace public) elle serait dispensée de fouilles...
« une opération archéologique spécifique »
Pour avoir été si bonne avec MM. CHEMLA et REZGUI, la Ville méritait bien d'être dispensée de ces fouilles. La DRAC n'en resterait pas moins vigilante, bien entendu... Un lot de consolation pour ceux qui estimeraient la "dispense" trop généreusement accordée ?
La construction du fameux bassin de rétention des eaux pluviales « plus important que prévu » (tiens donc) fera ainsi l'objet d'une « opération archéologique spécifique en relation étroite avec le service archéologie du Calvados » (les inventeurs du compteur à gaz dont il a été question plus haut, et des statues géantes gisant dans les caves de l'ancien musée des beaux-arts).
Il faut donc s'attendre à voir au mois d'octobre M. Vincent HINCKER ou l'un(e) de ses collègues sur le chantier de la place de la république, surveillant jalousement les manœuvres du godet de la pelleteuse au fond du trou, un trou plein de caves là encore, comme on le voit sur un plan de 1950...
J'ai assisté à une scène de ce genre il y a plus de 30 ans, dans la Cour des imprimeurs, à Caen. Le distingué préposé à la surveillance de la pelleteuse se contenta d'examiner de loin le contenu d'un godet (c'était une cave là encore), et décréta illico qu'il n'y avait pas lieu de poursuivre les recherches. Cette opération archéologique spécifique n'avait pas duré plus d'un quart d'heure. Il est vrai que, en pleine OPAH du Centre-Ancien, le chantier de réhabilitation de l'immeuble (classé MH) avait déjà pris du retard, et que l'architecte qui s'en occupait (et l'a affublé d'une étrange toiture en forme de pyramide tronquée) faisait office à l'époque d'Architecte des bâtiments de France...
Annexes
LRAR au DRAC 11 septembre 2018.pdf
et voici la réponse:
18:38 Écrit par Bruno dans Affaires municipales, La République n'est pas à vendre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jean-paul ollivier, directeur régional des affaires culturelles (drac), destruction de vestiges archéologiques, article 322-3-1 du code pénal, archéologie préventive, place de la république caen, rue paul doumer, rue georges lebret, joël bruneau, maire de caen, dominique laprie-sentenac, laurent chemla (le printemps), malek rezgui (groupe immoblier jean-sedelka), séminaire et église des eudistes, maison du tramway et des grands projets, karim gernigon conservateur régional de l'archéologie, vincent hincker, cour des imprimeurs