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vendredi, 29 août 2014

Conceptions du droit en usage sous un gouvernement dit « de gauche »…

Ça ne manque pas de zèle…

Je reçois tous les mois, dans ma boîte aux lettres électronique, la Lettre d’information de la Cimade. Celle-ci porte le n° 72 et la date du 28 août. Je ne lis pas, je l’avoue, tous les courriers que je reçois (et pas seulement de la Cimade). Pas tant pour le temps que cela prend, mais pour les états dans lesquels me met la lecture de tous ces récits d’abominations diverses et variées…
Mais là, je me suis fait avoir. Il suffit d’un clic…


Acharnement et violence dans l’expulsion d’une famille arménienne

http://www.lacimade.org/communiques/5078-Acharnement-et-violence-dans-l-expulsion-d-une-famille-arm-nienne-

Une famille d’origine arménienne avec une enfant de 7 ans (scolarisée) et un bébé de 8 mois a été expulsée hier à la suite d’une interpellation illégale d’une grande violence à son domicile, comme le montre une vidéo filmée par un témoin de la scène.
Selon les témoignages qui nous ont été transmis, le 5 août 2014, à six heures du matin, toute la famille a été réveillée par la police aux frontières (PAF) et le secrétaire général de la préfecture de Meurthe et Moselle en personne, dans le centre d’accueil de demandeurs d’asile (CADA) où elle était hébergée. Le père a d’abord refusé d’ouvrir, puis a accepté suite à la promesse du représentant de la préfecture lui assurant que s’il les accompagnait, il laisserait sa famille tranquille. Il a alors été transféré au commissariat de police.
Une heure plus tard, la police s’est présentée à nouveau au CADA. La porte de leur appartement a été en toute illégalité forcée puis en partie cassée. La mère a ensuite été empoignée et traînée dans les 3 étages de l’escalier sous les yeux du secrétaire général de la préfecture. Les deux enfants ont également été emmenés de force par la police. De nombreuses personnes ont été témoins de la scène et des vidéos ont été prises).
Traumatisées, la mère et ses deux petites filles ont été emmenées à leur tour au commissariat de police puis conduites au centre de rétention administrative (CRA) de Metz où avait été transféré son mari. Là, ils ont pu s’entretenir avec l’association présente (Ordre de Malte - France).
La famille a été expulsée de force le lendemain, 6 août, vers l’Arménie, sans pouvoir faire examiner sa situation devant un juge. Au-delà du caractère particulièrement inhumain dans cette affaire, la stratégie d’évitement de la justice par la préfecture est claire : la légalité du placement en rétention ne sera examinée par un magistrat que le 7 août en l’absence de la famille; les conditions de l’interpellation échapperont donc à tout contrôle de la justice.
Selon la famille, une tentative d’arrestation sur la voie publique avait déjà eu lieu il y a 3 semaines, alors que la mère et ses deux enfants étaient sortis acheter à manger. Cette tentative aurait alors échoué du fait de la présence de témoins scandalisés qui se seraient interposés pour les défendre.
 
La Cimade constate comme chaque année que l’Etat profite de la période estivale pour mener à bien les expulsions les plus choquantes, à l’abri des regards. Le zèle acharné de la préfecture de Meurthe et Moselle dans cette affaire, attesté par la présence du secrétaire général de la préfecture sur les lieux de l’interpellation, et la violence de cette situation sont particulièrement alarmants.
La Cimade demande le retour de cette famille et la fin de l'enfermement des familles et des enfants, conformément aux engagements de Monsieur Hollande.

 


Mais faut-il  croire encore aux engagements de Monsieur Hollande ?
Bien sûr, le PS a été « choqué », et il a « interpellé » le gouvernement (de Manuel VALLS, ancien ministre de l’intérieur), par un communiqué « très dur ». Bien sûr, la préfecture de Meurthe-et-Moselle se défend : «Ce sont des situations humainement difficiles tant pour les éloignés que pour les fonctionnaires», observe Jean-François RAFFY, le secrétaire général de la Préfecture. «Mais il n'y a eu ni violences, ni excès de zèle (…) ». Voire…
http://loractu.fr/nancy/7505-ce-que-l-on-sait-de-l-expulsion-violente-d-armeniens-a-nancy.html


Pas d’excès de zèle ?

Ce n’est pas vraiment le cas, comme le montre (chronologie des faits à l’appui) l’avocat lillois Norbert CLÉMENT, dans un excellent billet intitulé « Le monopole de la violence légitime », publié le 28 août sur le blog tenu par son cabinet. Un billet très documenté qu’il faut lire toutes affaires cessantes, tant pour la relation très précise des faits que pour l’analyse juridique qu’il fait des diverses entorses au droit que la Préfecture de Meurthe-et-Moselle s’est autorisées :
« De bout en bout, la procédure ayant abouti à l’expulsion du territoire de la famille B. aura été conduite par l’autorité administrative. Ou plus exactement, par une seule et même personne : M. Jean-François RAFFY, secrétaire général de la préfecture de Meurthe-et-Moselle. »
http://pole-juridique.fr/wp/?p=2427


Le monopole de la violence illégitime,
l’UMP en a rêvé, le PS le fait, et le FN va en profiter.

M. CLÉMENT ne pratique pas la langue de bois, et (c’est aussi son métier) sait décortiquer un projet de loi, et montrer (avec ce qu’il faut d’ironie) les dispositions liberticides qu’il comporte. Quelques extraits :
Le Parti socialiste a demandé « que toute la lumière soit faite sur cette affaire ». Pour toute réponse, le ministère de l’Intérieur a diffusé à la presse… le communiqué officiel du préfet de Meurthe et Moselle. Manifestement, Bernard CAZENEUVE a une conception de l’inviolabilité du domicile nettement moins soucieuse de la liberté individuelle que son prédécesseur Nicolas SARKOZY. Il ferait un sous-secrétaire de préfecture très acceptable.
Le projet de loi « socialiste » présenté en Conseil des ministres le 23 juillet 2014, qui prévoit (article 22) d’autoriser à l’avenir les arrestations à domicile des étrangers, permettra aux gendarmes et policiers, sur la foi des seules affirmations de fonctionnaires de préfecture, de venir, tout à fait légalement, défoncer la porte d’une famille d’étrangers, embarquer homme, femme, enfant et bébé et les reconduire immédiatement dans leur pays, sans qu’ils voient aucun juge.
L’UMP en a rêvé : le PS le fait ; et le FN va en profiter. Il en sera toujours ainsi lorsque le gouvernement « de gauche », étendant sans cesse et sans retenue les pouvoirs de l’administration, confinant le rôle de la justice à des contrôles symboliques, restreint les droits des étrangers et leurs moyens de les exercer.
A l’avenir, le Parti socialiste n’aura plus jamais à feindre d’être choqué. Il lui suffira de mettre son apathie sur le compte de sa cécité.

A La Rochelle, au milieu du vacarme de 200 paires de godillots (et combien de charentaises ?), une seule petite voix se fera-t-elle entendre pour rappeler au gouvernement que le PS fut naguère étiqueté parti de gauche, et les valeurs qui vont avec ?






Pôle Juridique est un cabinet d'avocats fondé en l’an 2000 qui défend les droits des particuliers et compte deux avocats exerçant dans le ressort du Tribunal de Grande instance de Lille : Norbert CLÉMENT et Ludivine HERDEWYN.
Leur blog, courageux, passionnant et très documenté, ne fait pas non plus dans la tiédeur. Il comporte en outre une base de données de droit des étrangers, certainement très utile à leurs confrères non spécialisés, et aux associations de défense des droits des plus fragiles.