lundi, 26 décembre 2011
Les projets de Duron, Le Coutour et consorts (Caen Habitat) pour l’avenue Georges Clémenceau, au Clos Joli et alentours…
DURON le 4 janvier 2012 au Clos Joli
Au commencement était le Verbe, et le Verbe était Dieu. Tout par lui a été fait, et sans lui n’a été fait rien de ce qui existe. C’est donc par un courriel municipal du 16 décembre que quelques habitants du secteur ont appris la venue prochaine sur leurs terres de celui par qui tout se fait et se défait :
« Dans le cadre du projet de renouvellement urbain du secteur Clemenceau, (…) une première opération de construction va être lancée par Caen Habitat sur les emprises démolies de Clos Joli. (…). Afin de vous présenter cette opération (…), une réunion publique est prévue le 4 janvier 2012 à 20 heures, à la Maison de quartier St Jean Eudes (38 Avenue du Calvados).
Cette réunion sera présidée par le Maire, en présence de M. Le Coutour, M. Lemonnier, M. Toullier, Caen Habitat et l’équipe d’Architectes du projet. »
L’impétrant est ?
Grande nouvelle, un projet avait donc été retenu, alors même que d’aucuns, habitants de ce quartier et vivement intéressés à l’évolution de son environnement, ignoraient qu’un concours avait été lancé (et quel en était évidemment le cahier des charges), et n’étaient même pas au courant des dispositions d’urbanisme spécialement bricolées cet automne par notre ami Xavier LE COUTOUR pour permettre, entre autres, la réalisation de ce projet. C’est bien sûr de la modification n° 4 du plan d’occupation des sols municipal dont il est ici question, huitième chapitre : créations d’emplacements réservés dans le secteur Clémenceau – Clos Joli – CHR)…
Comme j’ai pu l’expliquer ici même par une note du 18 septembre (http://caennaissivoussaviez.hautetfort.com/archive/2011/0...), les distraits ont des excuses. On a tout fait pour qu’ils ne s’aperçoivent de rien (arrêté de mise à l’enquête publique au mois d’août, conseillers municipaux pas au courant, site internet municipal pratiquement muet, etc.)…
Mais comme l’indique maintenant ce même site internet, la modification n°4 du POS a été approuvée par délibération du Conseil municipal en date du 12 décembre 2011. Ces dispositions sont devenues opposables aux tiers à compter du 22 décembre 2011, date d'accomplissement de la dernière formalité requise pour rendre la délibération exécutoire.
On ne pouvait tout de même pas commencer avant…
Des projets en compétition,
dont celui auquel vous avez échappé…
Mais venons au fait. Si, en fouinant de ci de là, nous n’avons trouvé que trois projets ayant concouru (il y en avait peut-être d’autres), il est sûr au moins que l’un des trois ne sera pas réalisé, et que ce candidat connaissait son sort dès le 1er décembre.
Ce candidat, c’est le cabinet LAN (Local Architecture Network), créé par Benoit Jallon et Umberto Napolitano en 2002, « avec l’idée d’explorer l’architecture en tant que matière au croisement de plusieurs disciplines ». Sage programme, point trop original. Et voilà leur projet :
http://www.lan-paris.com/fr/projects/index/id/65
Profitons-en pour appeler votre attention sur la petite phrase en exergue: « Une personne de l’agence a dit: "A closed block revisitation" ».
C’était un bloc en effet, et fermé. Voilà donc une agence où l’on ne manque pas de lucidité, et où l’on sait (brièvement) s’exprimer en anglais.
Mieux en tout cas que dans notre langue, comme en témoignent les deux lignes de texte figurant en dessous de la vidéo: « Après de comparaisons entre plusieurs volumétries, l’îlot fermé à cour centrale s’est relevé être le plus convaincant et le plus amène à répondre aux différents ambitions à la fois urbaines et architecturales ». Ainsi soit-il. Le français ne serait-il pas la langue dans laquelle on enseigne à l’Ecole d’Architecture de Paris-La Villette ?
Quant à la vidéo présentant ce projet, son plus grand mérite me semble résider dans l’art avec lequel elle sait faire défiler des nuages au dessus d'une masse compacte platement quadrangulaire, ou faire tomber une feuille -virtuelle- devant l'objectif d'une caméra tout aussi virtuelle…
Les projets auxquels vous n’avez peut-être pas échappé…
On peut consulter sur internet un autre projet, daté de septembre 2011 par ses auteurs (agence OLGGA, basée à Paris et à Lille), mais auquel ils se sont attelés dès le mois de mai de cette même année (soit plus de 6 mois avant l’approbation de la modification n° 4 du POS, ce qui montre bien le caractère éminemment démocratique de la gestion de l’urbanisme dans notre bonne ville).
Voilà une image de la chose (copie d’écran)
http://www.olgga.fr/fr/projets/caen
Sans compter l'inévitable vidéo (cette fois plus explicite, et pour tout dire plus honnête) en cliquant sur ce lien :
Remerciements à tous les figurants… Des gens du quartier dans le tas ? On peut en douter. Reste qu’on a là quelques indications utiles: nombre et taille des logements, modalité de stationnement pour les résidents, nombre impressionnant des cases commerciales en rez-de-chaussée, en face du mur du cimetière (improbable clientèle, si ce n’est pour une marbrerie funéraire)…
Monolithes en peigne sur socle, et vague verte ondulante…
On donne à nouveau dans un lyrisme de mauvais aloi avec le projet de l’agence CBA Architecture (Christophe Bidaud, architecte DPLG, Rouen):
« 3 monolithes sont implantés en peigne sur un socle (…) traité comme une vague verte ondulante et poreuse (…) Espace protégé et fortement planté, il permet la mise en place d'une réelle vie de quartier dans un écrin vert privilégié. (…) Les logements à RdC possèdent un jardin privatif traité comme un ruban vert, faisant écho à la vague verte sur l'avenue ».
Personnellement, je ne vois rien là de particulièrement ondulant, ni de vert et fortement planté, dans ce mur crénelé de casemates…
A vous de juger (sans l’aide de la moindre vidéo accrocheuse, cette fois) :
http://www.cba-architecture.com/Projets/Fiche-96-logements-collectifs-141-3-cat.htm?PHPSESSID=72e66215d89b3ff85a2aec42dbb94541
Qui dit concours dit jury ?
Est-ce un de ces deux projets (CBA ou OLLGA), ou un autre dont nous ne savons rien encore, qui a su séduire ceux qui, ici, décident vraiment ?
On aura noté que le président de Caen-Habitat, simple « Conseiller Municipal, délégué auprès de Xavier Le Coutour dans le domaine du logement social », n’est pas annoncé au nombre des participants à la réunion du 4 janvier prochain. Quantité négligeable sans doute. Mais l’office municipal sera tout de même représenté. De manière anonyme, comme il convient s’agissant d’un simple exécutant…
Sans doute est-ce là l’occasion de rappeler qui décide théoriquement de la politique de Caen-Habitat, dont le conseil d’administration ne compte que 4 représentants des locataires, pour 23 administrateurs au total, dont 3 adjoints au maire, 3 conseillers municipaux, des gens ayant des compétences, et quelques uns ou unes de leurs connaissances. Un des rares conseils d’administration dont Philippe DURON n’est pas membre.
Petits compléments utiles :
http://www.caen.fr/urbanisme/Projets/Renouvellement/clemenceau/index.asp
http://www.caen.fr/urbanisme/Projets/Renouvellement/clemenceau/ProjetClemenceau2011.pdf
13:20 Écrit par Bruno dans Urbanisme et logement | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : projet de renouvellement urbain du secteur clemenceau, caen habitat, clos joli, philippe duron, xavier le coutour, modification n° 4 du plan d’occupation des sols, lan (local architecture network), benoit jallon, umberto napolitano, olgga, cba architecture, christophe bidaud
dimanche, 18 décembre 2011
Un Guéant peut cacher un nain, voire toute une petite foule de nains…
Sous le titre « Le crachat et le rêve français… », Libération publiait le 2 décembre dernier une « Lettre à monsieur le ministre de l’Intérieur, de l’Outre-Mer, des Collectivités territoriales et de l’Immigration », rédigée par un jeune français de 23 ans, étudiant en droit, Amine EL KHATMI.
J’adhère à ce qu’il dit, et à la façon dont il le dit. Voilà pourquoi j’ai (paresseusement) recopié ci-dessous le texte de cette lettre, qu’on peut aussi aller consulter sur le site de Libé :
http://www.liberation.fr/c/01012375069-c
Monsieur le ministre,
La sous-direction de l’accès à la nationalité française du ministère que vous dirigez vient de signifier à madame S. Boujrada, ma mère, le classement de son dossier et un refus d’attribution de nationalité. «Vous ne répondez pas aux critères», est-il écrit dans un courrier sans âme que l’on croirait tout droit sorti de l’étude d’un huissier ou d’un notaire.
Ma mère est arrivée en France en 1984. Il y a donc vingt-huit ans, monsieur le ministre, vingt-huit ans ! Arrivée de Casablanca, elle maîtrisait parfaitement le français depuis son plus jeune âge, son père ayant fait le choix de scolariser ses enfants dans des établissements français de la capitale économique marocaine.
Elle connaissait la France et son histoire, avait lu Sartre et Molière, fredonnait Piaf et Jacques Brel, situait Verdun, Valmy et les plages de Normandie, et faisait, elle, la différence entre Zadig et Voltaire ! Son attachement à notre pays n’a cessé de croître. Elle criait aux buts de Zidane le 12 juillet 1998, pleurait la mort de l’abbé Pierre.
Tout en elle vibrait la France. Tout en elle sentait la France, sans que jamais la flamme de son pays d’origine ne s’éteigne vraiment. Vous ne trouverez trace d’elle dans aucun commissariat, pas plus que dans un tribunal. La seule administration qui pourra vous parler d’elle est le Trésor public qui vous confirmera qu’elle s’acquitte de ses impôts chaque année. Je sais, nous savons, qu’il n’en est pas de même pour les nombreux fraudeurs et autres exilés fiscaux qui, effrayés à l’idée de participer à la solidarité nationale, ont contribué à installer en 2007 le pouvoir que vous incarnez.
La France de ma mère est une France tolérante, quand la vôtre se construit jour après jour sur le rejet de l’autre. Sa France à elle est celle de ces banlieues, dont je suis issu et que votre héros sans allure ni carrure, promettait de passer au Kärcher, puis de redresser grâce à un plan Marshall qui n’aura vu le jour que dans vos intentions. Sa France à elle est celle de l’article 4 de la Constitution du 24 juin 1793 qui précise que «tout homme - j’y ajoute toute femme - né(e) et domicilié(e) en France, âgé(e) de 21 ans accomplis,tout(e) étranger(e) âgé(e) de 21 ans accomplis, qui, domicilié(e) en France depuis une année, y vit de son travail, ou acquiert une propriété, ou épouse un(e) Français(e), ou adopte un enfant, ou nourrit un vieillard, tout(e) étranger(e) enfin, qui sera jugé(e) par le corps législatif avoir bien mérité de l’humanité, est admis(e) à l’exercice des droits de citoyen français». La vôtre est celle de ces étudiants étrangers et de ces femmes et hommes que l’on balance dans des avions à destination de pays parfois en guerre.
Vous comprendrez, monsieur le ministre, que nous ayons du mal à accepter cette décision. Sa brutalité est insupportable. Sa légitimité évidemment contestable. Son fondement, de fait, introuvable. Elle n’est pas seulement un crachat envoyé à la figure de ma mère. Elle est une insulte pour des millions d’individus qui, guidés par un sentiment que vous ne pouvez comprendre, ont traversé mers et océans, parfois au péril de leur vie, pour rejoindre notre pays. Ce sentiment se nomme le rêve français. Vous l’avez transformé en cauchemar.
Malgré tout, monsieur le ministre, nous ne formulerons aucun recours contre la décision de votre administration. Nous vous laissons la responsabilité de l’assumer. Nous vous laissons à vos critères, à votre haine et au déshonneur dans lequel vous plongez toute une nation depuis cinq ans. Nous vous laissons face à votre conscience.
Quand le souffle de la gifle électorale qui se prépare aura balayé vos certitudes, votre arrogance et le système que vous dirigez, ma mère déposera un nouveau dossier.
Je ne vous salue pas, monsieur le ministre.
19:12 Écrit par Bruno | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : guéant