dimanche, 14 juin 2009
Venoix, un permis de construire dont on n'a pas fini d'entendre parler...
(La "chose" projetée est au centre, entre Roncevaux à gauche et Mme de Ségur à droite)
Le sac de noeuds des Tournesols,
2005-2009: 3 refus pour 1 permis...
Cela devait s'appeler « Les Tournesols ». Pourquoi pas les pâquerettes ? Pour la bonne raison que la société qui a sollicité ce permis de construire s'est approprié le nom de Van Gogh. C'est donc la Sarl Van Gogh 1, ce qui lui suppose des petits frères à venir. On proposera de prénommer Théo le n° 2. Mais quand on porte un tel nom, on ne dort pas toujours sur ses deux oreilles...
En effet, comme on le constatera à l'examen du permis de construire délivré le 21 avril 2009 (consultable via le lien ci-après), la demande de permis a été déposée le... 25 juillet 2005. Près de 4 ans plus tôt. C'est qu'entre temps, cette demande a essuyé 3 refus de la part de M. Daniel DETEY, l'adjoint alors compétent, le premier par un arrêté du 13 octobre 2005, le second par décision du 25 septembre 2006, et le troisième par un ultime arrêté du 15 janvier 2008 (liens ci-après). Soit un refus par an sur 3 ans, à peu de choses près. Mais ce n'est pas tout...
Permis de construire SARL Van Gogh 21 avril 2009.pdf
Refus n° 1 PC Van Gogh 13 octobre 2005.pdf
Refus n° 2 PC Sarl Van Gogh 25 septembre 2006.pdf
Refus n° 3 PC Sarl Van Gogh 15 janvier 2008.pdf
3 jugements du Tribunal Administratif de Caen...
et 3 arrêts de la Cour Administrative d'Appel de Nantes !
Ces 3 refus de permis étaient-ils justifiés, ou une manifestation intempestive d'hostilité de la municipalité précédente envers M. BLANDIN, gérant de la Sarl Van Gogh 1 ? C'eût été là chose assez inhabituelle, et tout à fait digne de susciter notre intérêt. Mais nous verrons cela plus tard.
Toujours est-il que M. BLANDIN, dès le premier refus (motivé par le seul aspect des constructions projetées), a confié ses intérêts à Me THOUROUDE (prof de droit et avocat à Caen), et saisi de l'affaire le Tribunal Administratif (TA) de Caen, qui a annulé ce refus par jugement du 15 juin 2006.
La Ville a fait appel de ce jugement, et répondu par un nouveau refus de permis à la demande présentée par le pétitionnaire le 24 juillet 2006. A quelques précisions près (relatives à ces mésaventures judiciaires de la Ville), l'arrêté du 25 septembre 2006 se contentait de reproduire mot pour mot l'arrêté annulé !
Devant tant de désinvolture, la Cour d'Appel Administrative (CAA) de Nantes a confirmé par un arrêt du 27 juin 2007 le jugement du TA du 15 juin 2006, lequel TA allait à son tour logiquement annuler, par jugement du 19 octobre 2007, le second refus de permis, copie conforme du premier...
Mais ne partez pas, ce n'est pas fini !
Jamais 2 sans 3...
Je vous ferai grâce de l'arrêt du 13 novembre 2007 de la CAA (n° 07NT00990) consultable sur Legifrance. Cet arrêt dit seulement que le maire de Caen ne pouvait pas fonder son second refus de permis sur « le motif censuré par le jugement du tribunal » (le motif esthétique, article R.111-21 du Code de l'urbanisme), et lui enjoint de statuer sur la demande de permis dans un délai d'un mois (soit avant le 18 janvier 2008), sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Je signalerai par contre que le troisième refus de permis (arrêté du 15 janvier 2008) se fonde sur des motifs un peu plus sérieux (dispositions de l'article UD7 du POS en présence de bâtiments en cours de réalisation sur le terrain voisin de la résidence Mme de Ségur), mais sans toutefois aller au fond des choses.
Le TA a d'ailleurs annulé ce troisième refus de permis, par un jugement du 27 mars 2009, et j'ignore par contre de quoi il retourne avec l'arrêt de la CAA du 3 mars 2009, mentionné lui aussi dans les visas du permis de construire délivré par Xavier LE COUTOUR le 21 avril 2009...
J'en avais pourtant demandé une copie au maire de Caen, dans une lettre recommandée du 14 mai (car les courriers non recommandés semblent se perdre à la mairie...), lettre par laquelle je lui demandais d'abord communication d'une copie complète du dossier de permis de construire. On nous a remis une copie d'un arrêt que je ne demandais pas (l'arrêt n° 07NT00990 du 13 novembre 2007, consultable sur Legifrance), mais pas celui que je demandais... S'agissant des plans figurant au dossier, on nous en a par contre fait payer 5, dont 2 en double. Histoire d'étoffer le dossier ?
Le projet en cause...
Il est sans doute temps de dire quelques mots du projet à l'origine de ces procès en cascade.
Il s'agit donc, pour la Sarl Van Gogh 1, de construire, en limite séparative (c'est à dire sur toute la « largeur » de son terrain), deux immeubles d'une hauteur de 14 mètres, comptant 10 logements chacun, sur une étroite bande (de 12 mètres de large au mieux pour une longueur d'environ 118 mètres), sise entre la sente de Cheux et la rue Lucien Nelle, au beau milieu des espaces verts de 3 résidences, Mme de Ségur d'un côté, Vikings et Roncevaux de l'autre.
Rien de tel qu'un dessin pour visualiser la chose. Celui que je vous propose est extrait du « Plan d'accompagnement de la Notice Paysagère », établi par l'Agence Schneider, architectes urbanistes à Caen.
On comprend immédiatement le manque d'enthousiasme des voisins pour ce projet, qui, pour les copropriétaires des 9 étages de la résidence Roncevaux, ceux des 7, 8, 9 et 4 étages de la résidence Mme de Ségur, comme pour les locataires de la résidence des Vikings (3 et 4 étages), leur vaudrait un triste vis à vis avec 2 barres aveugles de 4 étages (14 mètres de hauteur par 15 et 16 mètres de largeur). Plus de 400 m² de béton sans fenêtres disposés en deux écrans au beau milieu de leurs espaces verts...
La faute à l'article UD7 du POS...
De 2005 à aujourd'hui, les voisins de ce projet ne sont pourtant pas restés les deux pieds dans le même sabot. Ils sont notamment « intervenus » dans l'affaire, en soutenant jusqu'en appel le point de vue de la Ville de Caen (qui jusqu'à aujourd'hui refusait d'accorder le permis de construire sollicité par M. Eric BLANDIN, gérant de la Sarl Van Gogh 1).
Mais la Ville ne pouvait évidemment pas faire usage du seul argument vraiment pertinent dans cette affaire, la rédaction manifestement inadéquate de son POS, et notamment celle de son article UD7, dont les premiers alinéas permettent en effet aux constructions nouvelles en zone UD de « s'implanter jusqu'à la limite séparative, à condition qu'en tout point de chaque façade, la distance calculée perpendiculairement à celle-ci et la séparant d'une façade d'un autre bâtiment situé sur un terrain voisin soit au moins égale à:
« - la hauteur de la façade la plus haute avec un minimum de 5 m, si la façade la plus basse comporte des baies principales (...);
« - la hauteur de la façade la plus basse avec un minimum de 5 m, si cette dernière ne comporte pas de baies principales et que la façade la plus haute en comporte;
« - la plus petite des cotes suivantes - hauteur de la façade la plus basse ou moitié de la hauteur de la façade la plus haute - avec un minimum de 5 m, si aucune des deux façades ne comporte de baie principale. »
Voilà donc une disposition qui permet de s'attribuer la constructibilité du terrain voisin, même quand on ne dispose soi-même que d'un terrain de superficie très restreinte, ou de très étrange configuration (comme cette lanière de 12 mètres de large par 118 mètres de long). Car l'article UD5 du POS (CARACTERISTIQUES DES TERRAINS) porte de son côté la mention « Néant », et n'exige ni superficie minimum, ni le respect d'aucune autre caractéristique raisonnable (comme une largeur minimum).
La résistance continue...
La municipalité de MM. DURON et LE COUTOUR a donc décidé de capituler, après 3 échecs successifs au TA, et 3 autres devant la Cour d'Appel de Nantes. Elle abandonne ainsi les voisins de ce projet (qu'elle sait aberrant), alors qu'elle est seule responsable de la situation qui leur est faite. Et elle n'a même pas tenté d'y remédier par une modification du POS, qu'elle a pourtant déjà trouvé l'occasion de modifier sur d'autres points, en moins d'un an de présence aux affaires, et qu'elle entend encore bricoler d'ici la fin de l'année par la création d'une ZAC et 5 « révisions simplifiées »... Son souci n'est manifestement pas de résoudre les problèmes qui se posent aujourd'hui. Les grands projets à long terme sont tellement plus payants, en termes d'image...
Mais les voisins des 3 résidences n'ont pas pour autant perdu la guerre. Désormais débarrassés d'un allié encombrant (qui ne pouvait pas se servir des armes vraiment décisives), d'un allié passé à l'ennemi (en attaquant le permis accordé à la Sarl Van Gogh, c'est à une décision de la municipalité qu'ils s'attaqueront), ils auront les mains libres, et pourront notamment soulever les moyens tirés par exception de l'illégalité de diverses dispositions du POS de la zone UD (et d'abord les articles UD5 et UD7).
Et ils auront à leurs côtés l'association Hastings Saint Nicolas, toujours soucieuse de défendre et promouvoir un urbanisme de qualité, sur Caen et son agglomération.
22:52 Écrit par Bruno dans Le feuilleton des Tournesols | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tournesols, m. eric blandin, sarl van gogh 1, sarl pierre, résidence mme de sévigné, résidence roncevaux, résidence les vikings, caen venoix, sente de cheux, rue lucien nelle
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